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Guinée: Flics ripoux, priorités tarifées, routes dangereuses garanties

Parmi les 17 objectifs de développement durable à l’horizon 2030 adopté en septembre 2015, par l’Assemblée générale des Nations Unies il y a  la cible visant à réduire de moitié le nombre de décès et de traumatismes dus à des accidents de la circulation d’ici à 2020. Cette cible fait suite à l’adoption de la Décennie d’action pour la sécurité routière 2011-2020. Ambitieux programme souscrit par la Guinée.

Au niveau mondial, le rapport 2015 de l’Organisation mondiale de la santé estime que ce sont 1,25 million de personnes qui meurent chaque année suite à des accidents de la circulation routière. L’Afrique est la région la plus dangereuse en matière de circulation routière.

C’est ce constat qui a porté l’Assemblée générale de l’ONU a instauré la Journée mondiale du souvenir des victimes des accidents de la route en 2005 [A/RES/60/5] qui est observée le 16 novembre dans de plus en plus de pays, notamment en Afrique. Elle fournit l’occasion d’attirer l’attention de l’opinion publique sur les conséquences physiques, émotionnelles et économiques, provoquées  par les accidents de la route et de rendre hommage aux victimes de la route et aux services de secours et de soutien.

Il est difficile de voir tous ces signes en Guinée. Photo: veurey-voroize.fr
Il est difficile de voir tous ces signes en Guinée. Photo: veurey-voroize.fr

A cause de plusieurs raisons dont le mauvais état des routes, la vétusté des véhicules, le manque d’éducation routière dans les écoles ainsi qu’au niveau national et l’indiscipline des usagers de la route, la Guinée est l’un des pays les plus dangereux. Durant ces 4 dernières années 16364 cas d’accidents ont couté la vie à 2288 personnes et et en ont blessé 5700 autres, d’après des chiffres révélés par le ministre guinéen des Transports.

Même comparée aux pays voisins, dans ce domaine aussi la Guinée vient parmi les derniers. En effet, selon les données du rapport de l’OMS, tandis qu’en 2013, en Cote d’Ivoire, avec 594 071 véhicules immatriculés en 2013 on enregistrait 242 personnes pour 100 000 habitants mourraient des suites d’accidents de la route, au Mali avec 289 828 véhicules enregistrés, 256 décès et au Sénégal avec 401 910 véhiculés enregistrés on comptait 272 morts pour 100 000 habitants, en Guinée avec 33 943 véhicules, on enregistrait 273 décès en 2011.

Dans un article sur la sécurité routière publié en 2014 sur le site afriqueactualite.com, Mamadou Oury Bah cite les mesures que le directeur national de la sécurité routière: « envisage de se rendre ensuite dans les pays voisins de la Guinée pour étudier les meilleures approches possibles pour la réduction des accidents de la route. « Nous allons effectuer des sorties hors de la Guinée, au Mali, en Côte d’ivoire, au Sénégal, pour copier chez eux. Nous allons chercher à savoir ce qu’ils font pour réussir à réduire le taux d’accidents de circulation dans leurs pays respectifs ».

C’est louable! Mais il y a des mesures encore plus immédiates que son département pourrait prendre: assainir les rapports entre les usagers et les agents chargés de la sécurité routière.

Que l’on soit à pied ou en voiture dans les rues de Conakry, on n’est jamais à l’abri du racket des agents de police et de la gendarmerie en Guinée. Dans ces conditions, il est difficile que les usagers les respectent.

Taxi moto dans la ville de Mamou. Photo publiée par Badicko Diallo pour guineenews.org
Taxi moto dans la ville de Mamou. Photo publiée par Badicko Diallo pour guineenews.org

Bah Mamadou, grand reporter au Lynx, analyse les relations entre incivilité des citoyens et couplé avec l’absence de l’état et la disposition à la corruption des agents de la circulation.

 

Début de l’article

Les embarras de la circulation routière avaient été dénoncés depuis le début du 20 è siècle par le moraliste français Alain. La route est un bien culturel issu de la civilisation de l’automobile. Son partage est réglementé par un ensemble de lois, de textes appelé Code de la Route. Il est universel et obéit au bon sens et souci de prévenir les inévitables conflits inhérents à tout partage. Les agents des forces de sécurité (FDS), issus des agences de mise en application de la Loi, sont censés veiller à ce que les usagers de la voie publique obéissent à ce code. Les usagers et les agents des FDS ont l’obligation de connaitre ce Code. Pour l’appliquer.

Problème : en Guinée, même en matière de circulation routière, l’Etat et ses agents se moquent souverainement de la loi. Que constate-t-on ? Dans les carrefours, le comportement des agents est lamentablement indécent. Ces agents eux-mêmes, très souvent vieux sont mal vêtus, mal chaussés et d’une vulgarité qui sied mal à leur fonction d’agent public. Aucun usager ne les respecte. Parce qu’ils ne sont pas respectables ; ils ne sont pas dignes d’être respectés.   Ils passent leur temps à mendier, à arnaquer ces usagers dont certains semblent avoir monté un deal avec ces ripoux : les taximen et surtout les chauffeurs de magbana. Ils ne leur réclament aucun document et ne les verbalisent pour aucun manquement au Code de la Route. En contrepartie, les chauffeurs à travers leurs apprentis leur versent quotidiennement des sous. Les agents, carnets en mains relèvent systématiquement les numéros des magbana qui ont raqué. Pour récupérer ces sous de la honte, ils n’hésitent pas à créer des embouteillages, le temps de prendre ou de rendre la monnaie. Cette pratique les gênait au départ, mais aujourd’hui ils la font au su et au vu de tous

Nous avons même vu, alors que nous étions dans un taxi au niveau du Rond-point de Bellevue dont le sens giratoire est fermé à certaines heures par des barrières multicolores, nous avons donc vu, moyennant 1000 francs, le policier en faction ouvrir les barrières pour le taximan qui a raqué pour ne pas descendre jusqu’au niveau de l’entrée de la Résidence Présidentielle de Bellevue !

Plus humiliant, nous avons également vu un apprenti balancer un billet de 1000 francs par terre à un flic en lui lançant un méprisant « A tongo, gnangamadi ». Le pauvre hère, toute honte goulûment bue l’a ramassé et empoché ! Tel un clébard famélique fondant sur la charogne puante !

Au cours de l’année 1971, nous avions assisté à pareil spectacle à Kumassi, au Ghana. C’était avant l’arrivée de Rawlings au pouvoir. Aujourd’hui, si vous essayez ça dans ce pays, vous êtes assuré de pourrir en prison. L’Etat ghanéen s’est réveillé, pendant qu’en Guinée, il est mort et enterré.

Lorsque vous, policier, vous prenez les sous d’un usager, vous devenez son obligé, son esclave. Il ne vous respectera plus. Lorsque vous sifflez, il n’obéit pas. Pour l’arrêter, vous êtes obligé de vous plantez devant lui. En espérant qu’il ne va pas vous écraser. La respectabilité a un prix.

BAH MAMADOU LAMINE

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konakryexpress

Je revendique le titre de premier clandestin à entrer en Italie, le jour où la mort de Che Guevara a été annoncée. Mais comme ce serait long de tout décrire, je vous invite à lire cette interview accordée à un blogger et militant pour les droits humains qui retrace mon parcours dans la vie: https://fr.globalvoices.org/2013/05/20/146487/

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