Afrique de l'ouest: Les fondamentalistes ont remodelé la géopolitique sahélienne
AFRIQUE : Les massacres et destructions de villages entiers entrainant une terreur généralisée sur un vaste territoire couvrant des parties importantes du Nigeria, du Niger, du Tchad et du Cameroun sont entrain de devenir la source principale de préoccupation des dirigeants de la région.
Les initiatives des pays concernés se multiplient pour contrer l’ennemi commun. D’abord sur le plan national, avec l’adoption de mesures sécuritaires qui lèsent la liberté des citoyens: interdiction du port du voile intégral, durcissement des lois contre le terrorisme, imposition de couvre-feux et limitation dans les déplacement des populations.
Au niveau international, les pays directement concernés, auxquels le Bénin a décidé de se joindre, ont adopté plusieurs mesures dont la création d’une force militaire. A l’issue de la visite du Président Buhari du Nigéria au Cameroun, décision a été prise que cette force comptera 10 000 militaires, membres de la police et de civils. Ils ont aussi donné leur accord pour que le siège de cette force soit à Djamena, le Tchad étant le pays qui a mis le plus de troupes dans la composition de cette force, qui se sont montrées plus combatives. Elle sera commandée par le major général Iliya Abbah, du Nigeria.
Lova Rakotomalala, responsable des contenus originaux concernant les pays francophones sur globalvoicesonline.org a écrit un article en anglais pour ce réseau, dressant une chronologie partielle de l’offensive 2015 de Boko Haram, au Cameroun, au Tchad, au Niger et au Nigeria. La traduction a été faite par Suzanne Lehn, éditrice en second de GV en français.Deux attentats-suicides le 22 juin à Maroua, dans le Nord du Cameroun, ont fait plusieurs morts et un grand nombre de blessés. Dix jours plus tôt, 15 personnes étaient tuées par un kamikaze sur un marché bondé à N’Djamena, la capitale du Tchad, trois semaines jour pour jour après une explosion similaire qui avait coûté 27 vies dans cette même ville. Boko Haram, un groupe djihadiste basé au Sahel qui a récemment fait allégeance au mouvement Etat islamique, a revendiqué ces attentats. Le groupe a de nouveau frappé quelques semaines après les attentats de juin, cette fois à Jos, au Nigeria, tuant au moins 44 personnes. Boko Haram organise régulièrement depuis sept ans des attaques meurtrières dans la bande du Sahel. Pour riposter, une coalition de pays d’Afrique de l’Ouest s’est assemblée pour lancer une contre-offensive militaire dans l’espoir de réduire l’influence du groupe. Ci-dessous, une chronologie partielle de l’offensive 2015 de Boko Haram, qui s’est étendue au Cameroun, au Tchad, au Niger et au Nigeria. http://cdn.knightlab.com/libs/timeline/latest/embed/index.html?source=1pyKSYbLiDAcO_55vcwXQaSMxMybLCfTe6FDZg0HHw8Q&font=Bevan-PotanoSans&maptype=toner&lang=en&height=650
La situation au Cameroun
Depuis le 1er janvier 2015, Boko Haram a exécuté au moins 28 attentats majeurs sur le sol camerounais, en majorité dans l’extrême nord du pays. Selon les autorités locales de Maroua, les attentats-suicides du 22 juillet sont l’oeuvre de deux jeunes filles qui ont été vues mendier dans les rues les jours précédents. L’explosion a tué une douzaine de personnes au marché central, le nombre exact reste incertain. Une source policière a confirmé que les habitants ont entendu une double explosion. Malgré ces tragédies, l’armée camerounaise a obtenu quelques succès contre Boko Haram, même si le pays doit aussi faire face à un afflux massif de réfugiés fuyant les combats.
La situation au Tchad
L’individu qui a déclenché sa bombe le 11 juillet s’était déguisé en femme voilée pour dissimuler ses explosifs. Au vu de cette information, le gouvernement tchadien a décidé d’interdire le port du voile intégral pour prévenir des attentats similaires. Les conséquences de l’insurrection de Boko Haram ont profondément déstabilisé la région, notamment au Tchad, dont la puissance militaire est au fondement du maintien de la paix dans le Sahel. Ces derniers mois, le Tchad a déjà été secoué par des manifestations étudiantes, et le début le 20 juin du procès de l’ex-dictateur Hissène Habré.
Avant les élections de mars 2015, l’armée nigériane a repoussé avec succès Boko Haram. Néanmoins, une nouvelle offensive de Boko Haram semble se développer en attendant l’investiture de l’équipe du président Buhari. Ceci malgré le fait qu’un des premiers actes de M. Buhari a été de déménager le haut commandement de l’armée de la capitale Abuja à Maiduguri, dans l’Etat de Borno—au coeur de l’insurrection.
Explosion annoncée à Gombe, Nord-Est du Nigeria. Pas d’autres détails.
Le nouveau gouvernement n’en a pas moins recherché activement une assistance anti-terroriste internationale, comme le montrent les rencontres récentes du président Buhari avec ses homologues tchadien, camerounais et nigérien. M. Buhari a sollicité et obtenu des assurances de soutien du G7 et des Etats-Unis, où il se trouve en ce moment en visite d’Etat. M. Buhari a promis de négocier avec les insurgés, si cela peut amener la libération des 200 jeunes filles enlevées à Chibok il y a plus d’un an :
Si nous sommes convaincus que nous pouvons retrouver les jeunes filles, nous pouvons négocier, pourquoi pas. Notre but est de retrouver les jeunes filles. Nous leur demanderons ce qu’ils veulent et nous pourrons libérer les filles ; les rendre à leur école ; les réunir à leurs parents et les réinsérer, pour qu’elles puissent mener une vie normale.