Ayant vécu pendant deux ans et demi en Yougoslavie, c’est avec plaisir que j’ai appris ce matin qu’une Commission Vérité et la Réconciliation régionale allait etre formée par les anciennes républiques qui faisaient partie de la fédération.
Le blog balkans.courriers.info a publié un billet de Rodolofo Toè nous apprenant que:
Les républiques de l’ancienne Yougoslavie devraient constituer une « Commission Vérité et la Réconciliation régionale », afin de pouvoir élaborer une vision partagée des guerres des années 1990. Thomas Hammarberg, le Commissaire du Conseil de l’Europe pour les droits de la personne a présenté lundi à Sarajevo son rapport sur « Justice pot-conflictuelle et paix durable en ex-Yougoslavie ».
Lorsque j’ai consulté le site, la curiosité m’a poussé à aller sur celui du Conseil de l’Europe pour avoir plus de détails. Je découvre ainsi que M. Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, à l’issue d’une mission sur le terrain a présenté, à Sarajevo, un document (en anglais) sur la justice d’après-guerre dans l’ex-Yougoslavie. Ce que le commissaire dit s’appliquerait textuellement à la Guinée. En effet, on peut lire cette introduction au billet du Conseil présentant le document:
La réconciliation inter-ethnique, la cohésion sociale et la paix durable ne sont réalisables dans la région de l’ex-Yougoslavie que si les États remédient aux conséquences des graves violations des droits de l’homme dont des milliers de personnes ont été victimes pendant les guerres des années 1990. Les problèmes qu’il reste à régler exigent une vision empreinte de sagesse et une direction politique résolue. La paix et la stabilité dans la région doivent s’enraciner fermement dans les principes des droits de l’homme et de l’Etat de droit
Rappelant qu’en dépit des efforts déployés et les progrès accomplis, le lourd héritage des violences du passé récent est encore dangereusement présent dans toute la région de l’ex-Yougoslavie. Le sort des femmes violées, des personnes déplacées, des biens confisqués et l’impunité me rappellent la situation de mon pays. En effet voici ce qu’il a déclaré à ce propos:
L’impunité des crimes de guerre n’a pas été éliminée et le sort de quelque 13 500 personnes disparues n’a toujours pas été éclairci. Les milliers de femmes qui ont subi des violences sexuelles ne bénéficient toujours pas d’une assistance appropriée. Il y a aussi environ 438 000 réfugiés et autres personnes déplacées dont les demandes légitimes de réparation n’ont toujours pas été satisfaites. En outre, la situation d’environ 18 000 personnes qui, dans la région, sont apatrides ou risquent de l’être, notamment des Roms, pose de sérieux problèmes dans les domaines humanitaire et des droits de l’homme, qui doivent être traités et réglés conformément aux normes européennes et internationales consacrées.
Malheureusement, en Guinée, les dirigeants qui se sont succédés, ont plus plus cultivé le sentiment de l’appartenance ethnique que la recherche de la vérité, la réparation des torts et la réconciliation. Plus de 40 ans après leurs exécutions extra-judiciaires, les restes de mon père et ceux de plus de 50 000 autres victimes de la dictature, dont les véritables de l’indépendance guinéenne gisent toujours dans des fosses communes non localisés. Certains des biens laborieusement acquis par nos pères, nos frères et sœurs confisqués ou détruits lors des violences successives dans le pays n’ont pas été restitués. Aucun effort sérieux n’a été entrepris pour identifier les coupables des tueries et des viols.
M. Thomas Hammarberg dit ce que nous voudrions voir se réaliser en Guinée, lorsqu’il souligne que pour les états des Balkans il est capital d’établir des systèmes judiciaires nationaux efficaces afin non seulement de renforcer l’état de droit mais aussi d’accroître la nécessaire confiance de la population dans la justice et de renforcer la prévention des violations des droits de l’homme.
Comment ne pas penser au cas de la Guinée lorsqu’on lit?
Les efforts ont été sérieusement entravés par des divisions et des clivages ethniques persistants parmi les responsables politiques et les populations.
Pour contribuer à effacer les séquelles du passé, il est nécessaire même en Guinée comme le préconise le Commissaire européen, dans le cas des Balkans de procéder à une révision des manuels scolaires, afin qu’ils puissent aux futures générations « la promotion d’une connaissance véritable de l’histoire, favorisent la tolérance et la confiance entre les peuples, notamment les jeunes générations, et
permettent de lutter contre la discrimination et les clivages entre les différents groupes ethniques. »