Ces derniers temps, j’ai été très occupé pour la diffusion d’informations à propos de l’envahisseur qui est entrain de semer la peur et la mort dans de nombreuses localités de la Guinée, du Liberia et de Sierra-Leone. J’ai reçu plusieurs articles de la part de mon petit-frère Bah Mamadou Lamine, grand reporter au Lynx, hebdomadaire satirique de Conakry. Je partage avec vous ce premier article de la série. Il parle de la décision du Président Condé de célébrer la fête de l’indépendance chaque année dans une ville différente. Les investissements pour l’amélioration des infrastructures auraient su faire dans toute la région dont la ville choisie est la capitale régionale.
Cette année, les célébrations devaient se tenir à Mamou. Les investissements devaient se concrétiser entre autres dans la ville de Pita, où réside l’auteur. L’épidémie Ebola a changé la donne, offrant aussi au gouvernement une échappatoire car les travaux sont loin de se terminer, voire de commencer, pour des cérémonies qui auraient du avoir lieu le 2 octobre. En effet, la Présidence a fait savoir qu’en raison de l’urgence sanitaire dans laquelle la Guinée se trouve, les célébrations sont renvoyées au mois de décembre 2014 au lieu du 2 octobre.
N. B.Pour une fois encore, j’avertis ceux qui ne sont pas familiers avec le style du Lynx, la lecture e ce billet peut poser quelques soucis. Je m’en excuse d’avance.
Voici l’article:
Le Grimpeur [Alpha Grimpeur est le surnom que le Lynx a donné au Président Alpha Condé] aime beaucoup piquer les idées de ses voisins, même lointains, comme Mandela et son Afrique du Sud. Où il a ramassé son Arc-en- ciel qu’il a mal utilisé. Voila que de à Chez nous pays Eburnée, il s’empare de la Fête de l’Indépendance tournante. Houphouët avait, en son temps, initié cette approche pour que chaque chef-lieu de Département puisse constituer un pôle de développement local. Ainsi, en 1971, ce fut Bondoukou, la Cité aux Cent Mosquées, en plein pays Abron et Koulango, à un jet de pierre de la frontière ghanéenne. Nous venions à peine d’y être affecté comme vendeur de Participes passés au Collège de la ville.
Qu’y avons-nous vu ? La ville a été complètement retapée : voirie avec rues entièrement bitumées munies d’un système d’évacuation des eaux de pluie ; écoles construites et équipées ; un hôpital de référence construit et équipé ; un hôtel Trois Etoiles est venu compléter la chaîne de la Société Ivoirienne d’Exploitation Touristique et hôtelière, la SIETHO, etc.
Et comme là-bas, on ne pense pas qu’à la Ville, on a créé, la Coupe Nationale du Progrès qu’on attribue à l’occasion de cette Fête Tournante, au paysan le plus productif et le plus « moderne », y compris en terme de scolarisation des jeunes filles.
En Côte d’Ivoire, on pensait développement, modernisation de l’économie et de la société. Tout vieux potentat qu’il fût, le vieux Crocodile de Yamoussoukro pensait aux Ivoiriens. Qu’il a, avec mépris, « sortis du trou ». On est loin des woba-woba ronflants et du clinquant bidon de notre minable gouvernance ethnocratique qui se sont traduits par les réalisations qu’on a vues à Boké et N’Nzérékoré. Des réalisations de type « m’as-tu-vu », « voila moi » qui n’en finissent pas de ne pas finir. En Guinée, en copiant aussi mécaniquement, dans la copie du voisin ivoirien, on a rappelé à tous que notre position inconfortable de Pays-Cancre de la CEDEAO, et donc du Monde n’est pas usurpée. Avec notre désespérante et grimpante politique stupidement politicienne, on est toujours en situation électoraliste : Alpha Condé Président ad vitam aeternam ! Rien que ça. Comme si quatre ans déjà ce n’est pas quatre ans de trop.
L’autre semaine, Pita, en pleine terreur Ebola, a reçu une pléiade de Ministres dont celui du MATD [Ministère de l’administration du territoire et de la décentralisation] et celui des Travaux Pénibles [c’est-à-dire des Travaux publics], l’homme pour qui les Sidya, Cellou, Kou-Raté, Aboubacar Sylla et autres opposants sont des clébards [chefs des partis d’opposition qualifiés de chiens]. Ils sont venus, semble-t-il faire le suivi des fameux et minables chantiers de l’anniversaire de notre indépendance catastrophique. Ils sont venus, ils ont vu, ils ont été déçus. Aucun chantier n’a atteint 40% des travaux ! Le contraire eût été étonnant. Ils ont été lancés ici en Mai 2014 et confiés à des « entrepreneurs » fauchés, peu équipés et peu expérimentés. A charge pour eux de préfinancer les travaux. Quand on connaît le système bancaire guinéen qui n’est pas assis sur une Justice et un Code Foncier Domanial crédibles…Quand on sait que l’attribution des marchés est fondé sur le népotisme, le tribalisme, le régionalisme et la corruption… Un vrai marché de dupes où les caciques du pouvoir se sucrent sur fond de surfacturation. Les entrepreneurs sélectionnés sont
coincés « entre les preneurs » et les délais à respecter et les contrôleurs, toujours les mêmes.
Même dans les pays disposant d’une administration publique équipée et honnête, pareils chantiers, même minables comme ceux-là, se préparent plusieurs années à l’avance. Or, là, on ne démarre les choses qu’à quelques mois de l’anniversaire avec des entrepreneurs peu aguerris et qui, pour avoir les marchés ont dû arroser à gogo. On retrouve les mêmes acteurs à Boké, Nzérékoré et à Mamou. Y compris l’organisme de contrôle qui a eu le temps de se faire connaitre et d’être ouvert à la corruption. Tout ça sent la magouille, la mamaya, le théâtre où encore une fois, les Guinéens vont être grugés… Avez-vous remarqué que tous ces chantiers bordent les Routes « Nationales » tellement dégradées que ce sont en réalité des pistes nationales? En fait ce sont des chantiers électoraux destinés à montrer aux passants que l’actuel gouvernement RPG travaille : « Votez pour lui ». A-t-on évalué les impacts des réalisations précédentes de Boké et de Nzérékoré sur la qualité de la vie des citoyens de là-bas ? En lieu et place de ces infrastructures de type « m’as-tu-vu » ( en dehors des infrastructures judiciaires et sécuritaires), n’aurait-on pas pu construire des Hôpitaux ou des laboratoires d’analyses biomédicales à Mamou, Boké et Nzérékoré ? Pourquoi nos chefs se fichent-ils si souverainement des services sociaux de base? Bien sûr, eux et les leurs, à la moindre céphalée, sont évacués à Dakar, Ouagadougou, Abidjan, Casablanca ou Paris. Tant pis et merde aux pauvres.
Quand on sait qu’aucune ville de l’Intérieur ne dispose d’un service d’imagerie médicale et qu’au Plateau Technique de l’Hôpital Ignace Deen de Conakry, il n’y a ni Oxygène ni Radio fonctionnelle, on comprend pourquoi le gouvernement est incapable de prévenir Ebola.
Nous sommes heureux que la brochette de Ministres Grimpants ayant visité les chantiers de Pita récemment y soient arrivés par la route. Ils ont vécu le calvaire quotidien des citoyens, même si c’est en 4X4, parcourant l’axe PK 7 de Mamou à Pita, particulièrement méchant entre ce PK et Dalaba. Ils ont vu la nécessité de retaper cette route, même si elle va servir à ces chiens d’opposants d’aller chez eux ou aux cafards et autres punaises de la fréquenter.
Il faut la retaper au nom des Mandéndjallon et autres Roundés [dans une tentative de déstabiliser le Fouta-Djallon, fief électoral du principal parti d’opposition, des militants de la mouvance présidentielle ont cherché à fissurer le tissu social de la région]. Pardon, akè alayè, Mansa, Ministre des TP ; yandi !
Depuis l’indépendance [acquise en 1958], ni Mamou, ni Dalaba, la belle ville au merveilleux site très touristique qui ressemble à s’y méprendre (le site) à Arusha la Tanzanienne, ni Pita n’ont reçu le moindre kilo de bitume ! Les kilo promis par Dadis ont été « oubliés » et délocalisés par le Grimpeur. C’est lui seul et ses extrémistes qui savent pourquoi. Comme si l’Etat n’est pas une continuité…
Pas d’hôpitaux de référence, pas d’écoles ou d’universités de référence à même d’attirer les malades de chez nous ou d’ailleurs ou bien les jeunes des pays d’à côté. Et cette situation n’interpelle aucun de nos leaders au pouvoir.
Ces chantiers de la médiocrité gouvernementale seront inachevés. Même les Ministres Alpha venus zieuter les travaux l’ont constaté et reconnu. Ce sera autant de plaies béantes et laides qui vont accroitre la hideur de nos cités. Tels qu’ils seront exposés, ils vont chanter l’hymne à l’incapacité du Grimpeur de faire autre chose que la politique politicienne, stérile et appauvrissante.
BAH MAMADOU LAMINE