L’emprise croissante de la Chine sur les institutions internationales

Le Président américain s’est rendu ridicule au point que même lorsqu’il aurait pu avoir raison, on ne prête plus aucun crédit à ses propos, surtout lorsqu’il s’en prend à la Chine. Pourtant dans son Rapport mondial 2019, l’organisation non-gouvernementale Human Rights Watch a révélé comment la Chine est entrain de noyauter les organisations internationales du système des Nations unies. 

Quarante ans après le début de l’ère dite de « réforme et d’ouverture » de Pékin, les autorités chinoises tolèrent de moins en moins les critiques ou l’activisme politique.

Mais l’opinion publique internationale ne semble pas encore être consciente de la menace qui pèse sur les droits humains au fur et à mesure que le gouvernement chinois monte en puissance.

Dans les années 1990 et 2000, l’objectif de la Chine était en grande partie de se soustraire aux critiques formulées devant les principales instances des Nations Unies. Mais ces dernières années, Pékin a également cherché à étendre son influence et à imposer ses normes et politiques aux principaux organes internationaux des droits humains, affaiblissant ainsi l’un des seuls moyens de responsabilisation et de justice à la disposition des peuples du monde entier.

Si Pékin venait à réussir, ce ne sont peut-être pas seulement les 1,4 milliard de Chinois qui ne pourront plus obtenir justice par le biais des mécanismes onusiens, mais bien le reste du monde.

En 2017, Human Rights Watch a révélé au grand jour les efforts de Pékin pour museler les experts et les personnels des droits humains de l’ONU, empêcher les dissidents chinois de participer aux examens de l’ONU et manipuler les règles et procédures afin d’obtenir des évaluations plus conciliantes, affaiblissant non seulement le suivi de la situation en Chine par l’ONU mais aussi des abus perpétrés par d’autres gouvernements.

L’année 2018 a fourni un exemple parfait de cette stratégie chinoise. En mars 2018, Pékin a présenté au Conseil des droits de l’homme de l’ONU une résolution intitulée « Promouvoir la cause internationale des droits humains par le biais d’une coopération gagnant-gagnant ».

Un titre a priori inoffensif, n’est-ce pas ? Cependant, la résolution évacuait la notion de responsabilité pour les violations réelles des droits humains, suggérant à la place un « dialogue ». Le texte ne précisait aucune ligne de conduite vis-à-vis des auteurs de violations lorsqu’ils refusent de coopérer avec des experts de l’ONU, se livrent à des représailles à l’encontre des défenseurs des droits ou rejettent activement les normes des droits humains. Et la résolution ne reconnaissait pas même le rôle du Conseil lui-même dans le traitement des violations graves des droits humains lorsque le « dialogue » et la « coopération » n’aboutissent à aucun résultat. La résolution a été adoptée à une majorité alarmante.

Si ces idées deviennent non seulement des normes, mais également des principes directeurs pour le Conseil, les victimes d’abus soutenus par des États du monde entier – y compris le Myanmar, le Soudan du Sud, la Syrie et le Yémen – n’auront pratiquement aucune chance de demander des comptes aux gouvernements responsables. En lieu et place, elles devront rester en marge et espérer qu’il soit mis fin aux abus ou que ceux-ci soient réglés grâce au « dialogue » et à la « coopération ».

Si l’espoir demeure, c’est en raison de la préoccupation croissante que suscite au niveau international la montée en puissance de la Chine au sein de diverses organisations internationales, notamment vis-à-vis du peu de cas qu’elle fait des décisions de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ou de la stupéfiante disparition du président d’Interpol, Meng Hongwei, en octobre 2018. Un examen de la Chine par un organe de traité de l’ONU en août dernier a donné lieu à une couverture médiatique intensive des terribles exactions commises par Pékin à l’encontre des musulmans au Xinjiang. À l’occasion d’un nouvel Examen périodique universel de la Chine à l’ONU en novembre, des dizaines de gouvernements ont dénoncé ces violations et d’autres, de la peine de mort à la persécution de critiques pacifiques.

La résolution chinoise de mars 2018 n’était une victoire que pour Pékin et une perte pour tous ceux qui prennent au sérieux les violations des droits humains en Chine et à l’étranger. Le défi à relever pour les gouvernements consiste à renforcer les institutions mondiales sur lesquelles nous comptons tous pour protéger nos droits, tant que c’est encore possible.

Déjà en 2017, Kenneth Roth, directeur exécutif de HRW déclarait:

« La Chine poursuit un dialogue avec l’ONU au sujet des droits humains, mais souvent dans le but de faire taire les critiques et d’entraver l’accès des activistes qui travaillent sur les questions des droits dans ce pays », La Chine n’est pas le seul pays à se comporter de façon indésirable à l’ONU, mais son appartenance au Conseil de sécurité, son influence mondiale et sa répression féroce contre la société civile en font un modèle de mauvaise foi qui porte atteinte à l’intégrité du système des droits de l’ONU. »

Laisser un commentaire avec Facebook
Quitter la version mobile