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Malgré les critiques, un mouvement mené par des femmes en Inde maintient son combat contre la Loi sur la citoyenneté

The main protest area of Shaheen Bagh protests 15 Jan 2020. Image by DTM via Wikimedia Commons. CC 0
La principale zone de manifestation de Shaheen Bagh le 15 janvier 2020. Image de DTM via Wikimedia Commons, sous licence CC 0.

Je publie ce billet écrit par la blogueuse Anumeha Verma et que j’ai traduit de l’anglais au français et qui a été publié sur le réseau globalvoices.org le 27 février 2020. Je le publie car il concerne de graves violations des droits humains. En effet en Inde, ces jours-ci on assiste à des heurts opposant partisans et opposants d’une loi controversée sur la citoyenneté jugée discriminatoire par les musulmans indiens. Au moins 27 personnes auraient été tuées.

[Sauf mention contraire, tous les liens mènent à des sources en anglais]

Une manifestation dirigée par des femmes dans le quartier de Shaheen Bagh à New Dehli, en Inde, a captivé la nation et attiré l’attention du gouvernement. Ce qui a commencé avec une poignée de femmes musulmanes protestant contre le Registre national des citoyens (NRC, acronyme anglais) et l’amendement de la Loi sur la citoyenneté (CAA) le 15 décembre 2019, s’est rapidement transformé en une manifestation ininterrompue jour et nuit, avec la participation de plusieurs sections locales de la société civile et d’autres groupes d’activistes.

Après que des plaintes aient été déposées contre les manifestantes pour avoir provoqué des embouteillages, la Cour suprême indienne a nommé des médiateurs pour négocier le déplacement de la manifestation le 17 février. Cependant, les femmes de Shaheen Bagh ne sont pas d’humeur à céder et ont plutôt demandé au public : « Si nous pouvons tant sacrifier pour cette manifestation, les gens ne peuvent-ils pas tolérer un léger désagrément ? »

Les raisons de la colère

Le 12 décembre 2019, l’amendement de la Loi sur la citoyenneté (CAA) a été promulgué. La CAA offre des droits [fr] de citoyenneté aux réfugiés et immigrants des pays voisins qui appartiennent à des communautés religieuses spécifiques. Cependant, cette liste exclut les musulmans. La CAA, combinée à une proposition de mise à jour du registre national d’état civil (NRC) qui exige une preuve d’ascendance avec des documents tels que des actes de naissance, est considérée comme désastreuse pour la communauté musulmane [fr] minoritaire. Parmi les musulmans qui ne seraient pas en mesure de fournir ces justificatifs, ce qui peut être compliqué en raison des procédures d’état civil défaillantes, beaucoup craignent d’être déchus de leur citoyenneté et de se trouver sans aucune voie légale pour rester dans le pays, contrairement à d’autres minorités religieuses.

Lire aussi : Le bilan s’élève à 27 morts dans les manifestations contre l’amendement de la Loi sur la citoyenneté en Inde

Lire aussi : Modi instumentalise l’hostilité envers les immigrants bangladais en Inde pour justifier les changements de la loi sur la citoyenneté [fr]

Alimenté par la crainte des manifestantes de perdre leurs maisons et leur citoyenneté à cause de ces nouvelles mesures, le rassemblement de Shaheen Bagh est rapidement devenu une plate-forme d’expression du mécontentement face aux autres problèmes qui affligent le pays. Le chômage, la pauvreté, la corruption et le désenchantement vis-à-vis du gouvernement actuel sont quelques thèmes qui ont fortement figuré dans ces manifestations.

Posters and artwork on a closed storefront. Image by DiplomatTesterMan via Wikimedia commons. CC 0
Affiches et illustrations sur une devanture fermée. Image par DiplomatTesterMan via Wikimedia commons, sous licence CC 0.

Les femmes qui manifestent à Shaheen Bagh ont fait preuve d’une détermination sans faille et refusé de quitter les lieux. Ces manifestations ont inspiré des mouvements similaires dans d’autres régions du pays, notamment à Pune, Bangalore, Ludhiana, et Prayag Raj, où les citoyens concernés se sont montrés solidaires de leurs homologues de Delhi.

Jusqu’à présent, les manifestantes ont obtenu du soutien mais aussi été tournées en ridicule par des factions au sein du parti au pouvoir qui soutiennent que la CAA ne nuira pas aux intérêts des minorités.

Dilip Ghosh, chef du BJP du Bengale occidental lors de la manifestation de Shaheen Bagh à Delhi : lors de la démonétisation, on a beaucoup parlé de personnes qui mouraient dans les files d’attente. Maintenant, lorsque les femmes sont assises avec des enfants à une température de 4 à 5 degrés Celsius, personne ne meurt. Quel amrit (nectar) ont-elles pris? (28.1)

Cependant, certaines personnes ont ouvertement manifesté leur soutien aux femmes de Shaheen Bagh.

Ce Shaheen Bagh !!

Des manifestantes à Shaheen Bagh font un don de sang!

C’est ça l’humanité et cette révolution de masse est contre tout système qui s’oppose à l’humanité !

Shaheen Bagh représente chaque Indien!

Shaheen Bagh, c’est la nouvelle définition de l’humanité

Efforts de médiation

La décision actuelle de la Cour suprême de déplacer la manifestation de Shaheen Bagh est le résultat de plaintes déposées en raison des embouteillages à proximité du lieu de rassemblement. Bien que la Cour suprême ait confirmé le droit des citoyens à manifester pacifiquement, elle a néanmoins précisé que ce droit ne pouvait pas causer de gêne prolongée pour le public. Le quotidien Times of India a créé un blog où sont publiées des mises à jour sur les efforts de médiation.

#ShaheenBagh Dabang daadi, Bilkis Bano (82 ans) :

« Le HM dit qu’il ne reculera pas d’un pouce sur le CAA.
Nous ne toucherons pas non plus un cheveu à quiconque,
mais nous ne bougerons pas tant que la loi ne sera pas retirée »

« Hamne Angrezon ko bhagaya tha, tum kya cheez ho? »
(Nous avons chassé les Britanniques, que représentez-vous?)

La Cour suprême a reconnu aux femmes de #ShaheenBagh leur droit de manifester, mais leur a demandé de cesser de bloquer la circulation.

Mais Shaheen Bagh est bien plus qu’un simple site de protestation ou un embouteillage

Regardez #MintWideAngle avec @AunindyoC

Les médiateurs devaient achever les négociations et soumettre un rapport à la Cour suprême au plus tard le 24 février 2020.

On ne sait pas encore si les manifestantes seront forcées de se déplacer, mais les femmes de Shaheen Bagh se sont fait une place dans les annales de l’histoire des mouvements de protestation en Inde.

Consultez le dossier spécial de Global Voices : Qui paie le coût du déclin de la démocratie en Inde? (en anglais).

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konakryexpress

Je revendique le titre de premier clandestin à entrer en Italie, le jour où la mort de Che Guevara a été annoncée. Mais comme ce serait long de tout décrire, je vous invite à lire cette interview accordée à un blogger et militant pour les droits humains qui retrace mon parcours dans la vie: https://fr.globalvoices.org/2013/05/20/146487/

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