Depuis l’accès de la Guinée à l’indépendance, en 1958, jusqu’à sa mort survenue aux USA, en 1984, le Président guinéen, Ahmed Sékou Touré, a réussi à faire croire qu’il était pour l’émancipation de la femme guinéenne. Il a aussi bien utilisé leur soutien pour gagner le pouvoir et le maintenir, pendant 26 ans sans partage mais avec violence.
Des lois progressistes ont été adoptées et des nominations de femmes à des postes de responsabilités. Il les a nommées à des postes de responsabilités et il a adopté des lois progressistes en matière de mariage. Cependant au-delà de cette politique , il y a eu des dérapages qui ont abouti aux seules réelles révoltes contre sa dictature.
Voici quelques billets déjà publiés qui témoignent des rapports entre Sékou Touré et les femmes:
Guinée: Il y a 36 ans, la « révolution » secouée par la révolte des femmes
Guinée: La « confession » de Saran à Kankan
Cruauté, rapacité et discours soporifiques au nom de la révolution dE Sékou Touré
Aujourd’hui je vous livre le témoignage de Portos sur l’interrogatoire de Mme Mara Fanta, qu’il n’hésite pas à qualifier le symbole de la femme de Guinée, de son courage et de sa détermination. Cet extrait est tiré de son livre qu’on peut lire entièrement en cliquant sur ce lien: La vérité du ministre. Dix ans dans les geôles de Sékou Touré
Une nuit encore, nous entendons une voix de femme, énergique et ferme, s’exprimant en un soussou imagé :
— « Allez dire à votre maître qu’il se rappelle que c’est nous, les femmes de Guinée, qui l’avons mis là où il se vautre. A ce moment-là, il y avait en face de nous les fusils des colons que nous n’avons pas hésité à braver… Nous l’avions fait, car il nous demandait de l’aider pour l’amour de Dieu et de son Prophète.
— « Aujourd’hui, il a trahi toutes ses promesses et nous ne voulons plus de lui. Ses fusils ne pourront rien contre nous. Allez le lui dire. Mais je sais que vous n’avez pas ce courage…
— … il faut reconnaître la vérité, on vous a poussées vous les femmes… », hasarde une voix. Elle s’attire aussitôt un flot d’invectives de la part de son interlocutrice qui poursuit :
— « Qui peut nous pousser? C’est Sékou Touré seul qui nous a poussées, avec ses mensonges. Wule falà nara. Mikhi fakhè nara 7. Il a affamé tout le peuple, nous n’avons rien à mettre dans nos marmites pour nos maris, nos fils… mais nous ne voulons plus de lui… lui, il sait ce que cela veut dire, il nous connaît. Ce qu’on m’a fait là-haut 8… la façon dont les jeunes militaires m’ont vue nue, jamais mon mari lui-même ne m’a vue comme ça. Le courant passé sur tout mon corps m’a laissée toute en sang, comme si le courant pouvait m’amener à avouer les grossiers mensonges qu’ils veulent me faire dire. Je comprends bien maintenant la façon dont ils procèdent pour faire mentir et tuer les gens. »
Nous saurons, plus tard, que cette maîtresse femme, symbole de la femme de Guinée, de son courage et de sa détermination, s’appelle Mara Fanta. C’est un nom que je n’oublierai jamais. Malgré le traitement brutal, sauvage qu’on lui infligea, elle ne céda jamais ni aux brutalités ni à la torture. Les gardes, Fadama lui-même, avaient peur de l’affronter. Et plus d’un parmi nous, se sera senti petit devant sa résistance et sa détermination. Et, personnellement, du fond de l’obscurité de ma cellule, elle me fera me reposer cette question qui gît toujours enfouie quelque part dans le tréfonds de mon cœur, depuis ce jour, lointain et pourtant si proche, où j’ai enregistré ma déposition : pourquoi ai-je cédé ?
Mara Fanta disparaîtra du bloc, comme elle y était apparue, c’est-à-dire, une nuit comme un feu follet. Libérée ? Exécutée ? Je n’en saurai rien. A ma libération j’essayerai de la retrouver. Vains efforts. Peine perdue. Autant rechercher, par une nuit noire, une aiguille dans une botte de foin !