L’ONG internationale Reporters sans Frontières a publié un reportage sur les menaces qui pèsent sur les journalistes dans le pays le plus peuplé d’Afrique. En voici un extrait.
Depuis le 14 mars 2012, lorsque les pourparlers entre le gouvernement et Boko Haram ont été rendus publics, le journaliste indépendant Ahmad Salkida a été menacé à plusieurs reprises par appels téléphoniques anonymes. Le reporter, connu pour couvrir depuis des années les actions du groupe armé, a, entre autres, été accusé d’être un membre de Boko Haram et à l’origine des négociations qui se sont ouvertes. On lui a également expliqué que la secte et lui ne sont « pas censés exister ». Le journaliste a été suivi pendant plusieurs heures, le 15 mars, à Abuja, par un 4X4 blanc immatriculé dans l’Etat de Lagos. Déjà en juillet 2011, il s’était vu contraint de déménager de Maiduguri où il vivait, après avoir reçu des menaces d’individus identifiés comme appartenant au groupe Boko Haram. Ces menaces étaient intervenues suite à la publication dans le magazine Blueprint d’un article sur le premier kamikaze du groupe islamiste.
Le 11 mars, Boko Haram avait menacé de punir trois journaux, National Accord, Vanguard et Tribune, pour avoir diffusé de prétendues fausses informations lors d’une conférence par téléphone à Maiduguri, capitale de l’Etat du Borno. Le groupe islamiste affirmait que les journaux leur avaient prêté de fausses déclarations et avaient fait preuve de partialité dans leur traitement de l’information en encensant les forces étatiques et en présentant Boko Haram de manière négative. Le 9 mars, Boko Haram avait déjà menacé de « s’occuper » de n’importe quel journaliste qui « déformerait » son point de vue dans un article. Le Nigerian Tribune et leVanguard Newpapers avaient fait partie des journaux expressément cités par le porte-parole du groupe, Abul Qaqa.
Le 13 février 2012, six journalistes du New Nigerian, Blueprint, Aminiya, Voice of Nigeria, Hausa Service etNigerian Standard, ainsi qu’un cameraman de la Nigerian Television Authority (NTA) ont été agressés par une douzaine de personnes non identifiées à Katame, dans la région du gouvernement local de Silame (Etat du Sokoto), alors qu’ils couvraient la campagne de Alhaji Yusa’u Ahmed, candidat aux élections gouvernementales de l’Etat fédéré. Le véhicule les transportant a été attaqué par des hommes armés de machettes, couteaux, épées et bâtons.
Le 7 février, Akinola Ariyo, photojournaliste pour le New Nigerian, a été menacé par un officier qui a pointé son arme sur lui en lui ordonnant de déguerpir, alors qu’il accompagnait des personnes venues tenter de négocier la réouverture du centre de presse de l’aéroport international Murtala Mohammed de Lagos.
Le 1er février, trois agents de sécurité ont agressé le responsable marketing du Daily Trust à Port Harcourt,Hassan Adebayo, et le chauffeur de leur véhicule de distribution, Sani Musa, alors que tous deux se rendaient chez des vendeurs pour leur rapporter les éditions de la journée. Les agents, à bord d’un véhicule Toyota Hilux d’immatriculation RV 96 AO1, ont tout d’abord attaqué le chauffeur qui est parvenu à s’enfuir avant de vandaliser le véhicule en cassant les rétroviseurs latéraux.
Le 20 janvier, Enenche Godwin Akogwu, 31 ans, correspondant pour Channels TV à Kano (Nord), a été abattu par balles alors qu’il tentait de couvrir les attentats meurtriers perpétrés le même jour par la secte islamiste Boko Haram faisant au moins 185 morts. Le journaliste était en train d’interviewer des victimes devant le commissariat central de police de Farm, touché dans les attaques, quand une personne non identifiée lui a tiré a plusieurs reprises dessus.
Dans une autre affaire, Nansok Silas, journaliste pour la station de radio Highland FM, a été retrouvé mort le 19 janvier 2012 dans un ruisseau sous un pont de la route Zaramagada-Rayfield, à deux cents mètres d’un check-point militaire de la ville de Jos (au Nord-Est d’Abuja). Aucun de ses effets personnels de valeur n’a été volé ce qui fait craindre à ses collègues un assassinat de sang froid. Les causes et raisons de sa mort restent cependant inconnues. Originaire du territoire de Langtang North dans l’Etat de Plateau, le journaliste, qui avait rejoint Highland FM depuis trois ans, animait un programme appelé « Highland Profile » et n’avait jamais fait l’objet de menaces auparavant. Reporters sans frontières a demandé aux autorités nigérianes qu’une enquête sérieuse et approfondie soit lancée afin de faire toute la lumière sur cette affaire, en n’écartant pas la piste du mobile professionnel.
Le 3 janvier, le bureau régional de Daily Trust a été envahi par des vandales, qui ont tenté de mettre à sac les locaux et de s’attaquer aux employés. Une seule personne impliquée dans cette tentative avortée avait ensuite été arrêtée. Elle a été inculpée de « conspiration criminelle », « agression », « intrusion criminelle », et de « vouloir causer la terreur par le feu ».
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