Paul Kagame, l'homme qu'il fallait au meilleur moment, pour un peuple en détresse!

Ces jours-ci, on commémore les 22 ans du génocide tutsi au Rwanda. Mais, loin de moi de verser des larmes, comme je l’ai fait pendant près de deux décennies. Je préfère retenir ce que le peuple rwandais a fait pour se réconcilier et aller de l’avant.

Je vous propose donc, paru l’année dernière sur konakryexpress.wordpress.com, avant que je ne crée ce blog konakryexpress.org. J’ai fait quelques révisions pour le mettre à jour.

Je suis contre toutes les formes de dictature. Au-dela des raisons politiques et morales, je le suis car mon père a été victime de la tyrannie de Sékou Touré . Moi-meme, j’ai failli finir au Camp Boiro, pour un simple contrôle d’identité, le jour même de mon arrivée à Conakry pour y passer mes vacances.

C’est lorsque les militaires étaient entrain de prendre nos noms que mon père et son meilleur ami Barry III sont arrivés pour m’extirper des griffes des tortionnaires.

En outre, la dictature a ruiné les bases memes du développement socio économique de la Guinée et déchiré le tissu social au point que le pays n’arrive toujours pas à s’en relever, 32 ans après la mort du sanguinaire dictateur. A cause de cette dictature sanguinaire, j’ai vécu des décennies en exil, sans-papier.

Mais, si j’étais rwandais, j’aurais fait comme ces près de 4 millions, sur un corps électoral de quelque 6 millions, de mes compatriotes qui ont signé en quelques semaines, des pétitions demandant au Parlement de modifier l’article 101 de la Constitution limitant à deux le nombre de mandats présidentiels successifs.

J’aurais applaudi, lorsque le Parlement à l’unanimité a donné, le mardi 11 août 2015, son feu vert et le peuple s’est prononcé à plus de 98 pour cent en faveur de cette réforme constitutionnelle.

J’ai vu Kigali quelques semaines après la fin de ce cauchemar que fut le génocide. J’ai senti l’odeur des corps en putréfaction dans les rues, j’ai vu les chiens engraissés pour avoir mangé de la chair humaine, les images des taches de sang visibles partout sont encore présentes dans ma mémoire. Aucun service n’était opérationnel. Cela veut dire ni banque, ni hôtel, ni restaurant, ni poste, ni police: rien!!!

J’ai fait partie de la première vague de fonctionnaires à aller à Kigali pour préparer l’arrivée des autres. Bien qu’étant fonctionnaires de la MINUAR2, mes collègues et moi, nous étions obligés de dormir à même le sol et à 4 dans le même bureau, celui du chef de la Section des NTIC, pendant plusieurs jours. Nous faisions la toilette avec de l’eau minérale, fournie par le contingent canadien, nous mangions des rations militaires du contingent militaire français. Ce sont les militaires indiens et australiens qui nous soignaient.

De par mes fonctions de chef de la section des services généraux et de président du bureau interne d’enquêtes de la MINUAR2, j’ai visité le pays en long et en large, par voiture et par hélicoptère, j’ai vu l’entité des dégâts qu’une guerre fratricide avait provoqués meme dans les endroits les plus reculés.

Pendant deux décennies, après avoir quitté le Rwanda, je n’ai jamais pu faire une conférence ou animé un débat sur mon expérience sans éclater en sanglots, même devant des enfants des écoles primaires ou devant des professeurs d’université.

J’y suis retourné en 2012 pour voir si la vue de ce qu’était devenu le pays depuis mon départ. Là où il n’y avait que ruines, il y avait des réalisations et des chantiers de construction de routes et de bâtiments, des parcs et des hôtels pour toutes les poches. La ville avait tellement changé que j’ai eu des difficultés à reconnaitre la route pour aller à la résidence que j’ai occupée pendant 2 ans et demi.

Dans les temps modernes, le Rwanda n’a jamais vécu une période de paix et de stabilité aussi longue que depuis que le Président Paul Kagame est arrivé au pouvoir. Durant cette période, le développement a été spectaculaire. S’il quittait le pouvoir, a-t-on l’assurance de trouver un autre dirigeant qui fasse mieux que lui pour maintenir la concorde nationale? On peut ne pas aimer ce que fait le Président Kagame en matière des droits humains, mais son régime a démontré sa capacité à maintenir le pays uni, malgré le lourd passé. C’est pourquoi, j’aurais aimé le détester, mais il reste mon dictateur favori et que je souhaiterais voir à la tête de nombreux états africains.

Dans cet article que ,’ai écrit sur le réseau fr.globalvoicesonline.org, traduit en 6 langues, je vous livre mes sentiments sur ce que j’ai constaté d’une manière documentée à propos du Rwanda. Le titre original était: Rwanda: De sérieuses fissures sur le tableau d’honneur de Paul Kagame.

Colloque sur la prévention du recrutement d’enfants soldats par la RPA – domaine public

On ne peut pas effacer d’un trait les atrocités et autres tueries entre voisins, aboutissant à l’extermination de 800 000 à 1 000 000 de personnes soit environ 80 pour cent des Tutsis et de nombreux Hutus, (environ un sixième de la population totale du pays) en quelques semaines.

Vingt ans après, le processus de réconciliation a encore un long chemin à faire.  Pourtant, la volonté politique affichée par le gouvernement commence à donner des fruits. Sur le plan juridique le pays s’est doté d’une Commission nationale pour l’unité et la réconciliation. Créée en 2001, elle avait pour but de promouvoir l’unité, la réconciliation et la cohésion sociale entre les Rwandais et de construire un pays où tout le monde a les mêmes droits et contribuer à la bonne gouvernance.
Susan Thomson, professeur de politique africaine contemporaine aux Five Colleges (Hampshire College, Amherst, États-Unis d’Amérique), écrit dans un article publié sur le site du Cairn :

Sous la férule du RPF, l’État postgénocide a largement contribué à restaurer la paix, l’unité et la réconciliation aux quatre coins du pays. L’appareil d’État rwandais, solide et centralisé, a facilité une reconstruction rapide. À la différence de la plupart des autres États africains, le Rwanda est capable d’exercer son contrôle territorial avec une efficacité extrême. Les institutions de l’État ont été restaurées.

La Rwanda Peace Academy (RPA) a aussi été créée en 2009 avec l’appui du Japon et du Programme des Nations unies pour le développement. Son mandat est de: effectuer des recherches, développer et offrir des cours de formation professionnelle et des programmes éducatifs internationalement reconnus afin de doter l’armée, la police et le personnel civil des compétences nécessaires pour répondre aux défis actuels et futurs complexes de paix et de sécurité en Afrique.

Une des réalisations les plus remarquables du Rwanda a été la promotion de l’égalité des sexes dans de nombreux domaines. Le pourcentage de femmes au parlement rwandais est le plus élevé au monde, avec près de 64 pour cent, d’après le classement établi par l’Organisation internationale des parlements, à la date du 1er février 2014, sur 189 pays.

Louis Michel, ancien ministre belge et commissaire européen, note sur son blog personnel :

Ces résultats sont spectaculaires : en moins de dix ans plus d’un million de personnes ont été sorties de la pauvreté extrême et le pays a enregistré un taux de croissance économique stable de 8% par an. Plus de 95% des enfants ont aujourd’hui accès à un cycle complet d’éducation primaire, la mortalité infantile a été réduite de 61% tandis que les trois quart de la population ont accès à l’eau potable. Enfin, près de 50% des femmes ont accès à un moyen de contraception, ….. Cela fait du Rwanda l’un des très rares pays d’Afrique qui pourra affirmer avoir atteint la quasi-totalité des OMD en 2015.

Commencé en 2001,  le premier plan quinquennal pour le développement des nouvelles technologies a permis de réaliser des progrès significatifs. Au cours de la deuxième phase de ce plan, qui s’est achevé en 2010, le Rwanda a enregistré une croissance du nombre d’utilisateurs de 8 900%, contre 2 450% pour le reste du continent et 444% de moyenne mondiale. Le site africarenewal/fr fait savoir également que quatre divisions du secteur public (ministères, agences, provinces et districts) et près d’un tiers du secteur privé étaient présents sur le Web. Kigali joue, en outre un rôle de premier plan dans la gestion du système de surveillance de la navigation et des télécommunications aérienne dans toute la région.

Partant du principe cher au Président rwandais Paul Kagame selon lequel “Internet est un service d’utilité publique au même titre que l’eau et l’électricité”, en collaboration avec Rwandan Telecentre Network (RTN), le gouvernement a mis au point un plan pour le développement d’Internet dans les zones rurales. Un billet publié sur balancingact-africa.com relève que:

Rwandan Telecentre Network (RTN) s’est rallié aux efforts du gouvernement et s’est engagé à créer un réseau national de 1 000 centres TIC d’ici la fin de 2015 et à former du personnel local.

Toujours dans le domaine de l’accès aux nouvelles technologies, parmi les pays africains participant au programme One Laptop per Child (un portable par enfant), le Rwanda est le plus avancé dans sa réalisation: Selon des informations de Wikipedia mises à jour le 28 avril 2014:

En 2013, 400.000 ordinateurs portables XO-XS ont été distribués.

Les violations des droits humains au Rwanda 

Malheureusement, ce beau travail est gâché par de graves violations des droits humains qui sont rapportées par les organisations militantes. C’est une pratique initiée depuis quelques années. Déjà, en 2012, après avoir envoyé plusieurs missions dans ce pays, Amnesty International dénonçait:

Entre mars 2010 et juin 2012, Amnesty International a rassemblé des informations sur 45 cas de détention illégale et 18 allégations de torture ou d’autres mauvais traitements à Camp Kami, dans le camp militaire de Mukamira et dans des lieux de détention clandestins situés dans la capitale, Kigali. Ces hommes ont été détenus par le J2 durant des périodes allant de 10 jours à neuf mois sans avoir eu accès à des avocats, à des médecins ou à leurs proches.

Des cas d’assassinats d’opposants sont signalés même en dehors du pays.   Des journalistes ou d’anciens dirigeants politiques, qui ont été proches du président rwandais ont été arrêtés ou bien assassinés. Les dernières arrestations se sont vérifiées au début du mois d’avril 2014. Le site arretsurimages.net signale l’arrestation du célèbre chanteur Kizito Mihigo, lui-meme rescapé du génocide rwandais, et trois autres personnes, dont un journaliste, avec l’accusation d’avoir préparé un attentat à la grenade contre un immeuble de Kigali.Pourtant, Kizito Mihigo est connu pour son engagement en faveur de la paix. Il a même fondé une ONG pour l’éducation à la paix. On peut lire sur son blog Kizitomihigo :

Depuis l’année 2003, il a œuvré pour le pardon, la réconciliation et l’unité dans la diaspora rwandaise en Europe. En 2010 quand il est rentré au Rwanda, il a Fondé la Fondation KMP (Kizito Mihigo pour la Paix), une ONG rwandaise qui utilise l’art (musique, theatre poesie, ..) dans l’éducation à la Paix, à la Réconciliation et à la Non-violence après le génocide.

Le chanteur a plaidé coupable, mais de sérieux doutes sont soulevés de toute part sur plusieurs aspects de cette affaire.

D’autre part depuis quelques années les relations diplomatiques de Kigali avec plusieurs pays sont tendues. De pays choyé par l’occident, le Rwanda est entrain de devenir infréquentable et les suppressions de l’aide militaire et au développement se multiplient. Les relations diplomatiques sont tendues avec l’Afrique du Sud, suite aux assassinats d’opposants dans ce pays. Déjà, il y a eu des expulsions de diplomates des deux cotés.

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