Guinée: Transition sous surveillance, mais sans ambages

Les électeurs guinéens sont appelés aux urnes le 27 juin prochain. Lorsque la crise a éclaté, après les violences du 28 septembre au stade du même nom, la communauté internationale avait utilisé un ton dur pour condamner les graves violations des droits humains, les viols de femmes de tout âge en plein jour par des militaires qui relevaient directement de la garde rapprochée du capitaine Dadis Camara, qui était alors à la tête du pays. Bien que tous les guinéens souhaitaient une condamnation internationale, il était difficile de s’attendre à ce que les institutions internationales intergouvernementales aillent au-delà des condamnations verbales et des résolutions prises à l’unanimité. L’Union africaine n’est-elle pas un club de chefs d’état, l’ONU n’est-elle pas prise en otage par les grandes puissances lors des crises internationales, chacune cherchant à satisfaire ses alliés plutôt que de se soucier du respect de la Charte? Après que la CEDEAO eut nommé le président du Burkina M. Blaise Compaoré médiateur dans la crise, les pries craintes semblaient se confirmer.

Eh bien, le déroulement de toute l’histoire démontre que pour cette fois-ci, la communauté internationale a joué le jeu. Après les indignations et les résolutions de condamnation, les organisations intergouvernementales régionales ou du système de l’ONU comme les ONG tant nationales qu’internationales ont déployé les grands moyens pour que la crise ait un dénouement heureux. Des missions ont été envoyées par l’ONU à Conakry pour enquêter et pointer du doigt les responsables. Le Tribunal pénal international a envoyé ses plus hauts responsables pour initier les procédures d’enquêtes judiciaires. Un Groupe International de Contact sur la Guinée a été créé et s’est régulièrement réuni pour suivre les progrès accomplis pour le rétablissement de l’ordre consitutionnel. Il est constitué de représentants de la Cedeao, de l’UA, de l’ONU, de la Cen-Sad, de l’OCI, de l’OIF, de l’UE et de l’Union du fleuve Mano. Sa 13ème réunion a eu lieu du 15 au 16 mai derniers dans un hotel de Conakry.

Lors de cette réunions, Dr. Mohamed Ibn Chambas, Président de la Commission de la CEDEAO, avait tenu les propos suivants, rapportés par le site nlsguinee.com aux gouvernement et aux partis politiques:

« N’acceptons pas que la campagne soit nourrie de violence. Je lance un appel à tous les partis politiques à faire en sorte que le climat soit paisible et établir une égalité de chance. Il faut se préparer à accepter la défaite tout comme la victoire, pour que le peuple soit le plus grand gagnant ».

Heureusement pour les Guinéens la communauté internationale a pu trouvé un interlocuteur valable au sein de l’armée, en la personne du Général Sékouba Konaté qui n’a pas été impliqué dans les violences du 28 septembre, pour servir de pilier sur lequel pouvoir axer le processus de transition. Jusqu’à présent son parcours a été sans faute. Les accords signés le 15 janvier à Ouagadougou sont suivis à la lettre: un gouvernement a été formé avec un Premier ministre, M. Jean-Marie Doré, qui ne pourra pas se présenter aux futures élections, comme aucun des membres de l’exécutif, la Conseil nationale de transition sous la présidence de Hadja Rabiatou Diallo, qui a préparé une constitution déjà promulgué, une refonte de l’armée a été initiée et des militaires qui étaient en prison depuis 1998 pour avoir tenté de renverser le Président Conté en 1996 ont été libérés et réhabilités.

Le site web kanal.150 croit savoir que cette réhabilitation des anciens mutins des 2 et 3 février concerne entre autres, le commandant Yaya Sow, le lieutenant Lamine Diarra, le colonel Kader Doumbouya, le commandant Bago Zoumanigui. Considérés comme les cerveaux de la grande mutinerie qui a failli être fatal au règne de feu Général Lansana Conté, ces militaires avaient été arrêtés, jugés et condamnés par une Cour martiale.

Ce rappel des faits qui avaient très vite pris des tournures particulièrement périlleuses pour le pouvoir du président Conté qui a fut arrêté puis séquestré pendant quelques heures par les soldats mutins.

En maintenant qu’il prenait de telles mesures de détente et de justice, le général Sékouba Konaté avertit depuis le début du processus de transition, il n’a jamais perdu d’occasion pour mettre en garde son entourage immédiat contre toute velléité de prolonger la transition et qu’il ne tolèrerait aucune entrave à la tenue des élections le 27 juin prochain, comme nous le rappèle afrik.com. Et qu’il serait prêt à utiliser tous les moyens à sa disposition pour mettre les fauteurs de troubles hors d’état de nuire. C’est dans ce cadre qu’il faut placer la détention sans jugement depuis vendredi des principaux chefs militaires de la junte qui soutenait le Capitaine Dadis. En tout cas cette liste d’officiers supérieurs arrêtés comprendrait, selon Fode Camara, Aminata.com:

1- Lieutenant-colonel David Haba, ex Directeur de cabinet du ministère de la défense nationale

2- Colonel Oumar Sanoh, ex chef d’état major général des armées

3- Colonel Abdoulaye Keita, ex chef d’état major général adjoint des armées

4- Colonel Mamadi Mara, ex chef d’état major de l’armée de l’air

5- Lieutenant-colonel Amara Samaké, chef d’état major adjoint de l’armée de l’air

6- Colonel Ansoumane Kaba, ex chef d’état major de l’armée de terre

7- Lieutenant-colonel Moriba Abel Haba, ex chef d’état major adjoint de l’armée de terre

8- Lieutenant-colonel Alpha Ousmane Diallo, ex chef d’état major adjoint de la marine.

L’arrestation de ces officiers est pas légale dans la forme. Autrement ce sont tous des individus qui étaient au courant des massacres et des viols que leurs troupes ont commis le 28 septembre. Ils pourraient bien faire partie de ceux qui en Guinée ne voudraient pas voir le processus électoral avoir lieu de manière pacifique. Ces individus qui sont sous la menace de la justice nationale et internationale, pourraient bien avoir eu dans l’esprit de changer par la force le cours normal de la transition.

Mais l’état ne peut pas détenir au delà des limites légales meme des tueurs et des violeurs sans inculpation. Ils doivent être traduits devant la justice.

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