Une lettre signée par 23 organisations et journalistes africains militant pour la protection des droits des médias a été adressée aux membres du Conseil Exécutif de l’UNESCO demandant de révoquer le prix Obiang Nguema Mbasogo pour la Recherche en Sciences de la Vie. Cette lettre est venue en un moment opportun car il ne faudrait pas que les difficultés financières dans lesquelles verse cette organisation conduisent son Conseil exécutif à lever sa suspension qui avait été décidée la dernière fois en octobre 2011. Le principe de son maintien devait être débattu ce printemps.
Le lobby constitué par les pétrodollars soustraits par la corruption et l’achat de biens mal acquis à la population de la Guinée équatoriale avait réussi en 2010 à faire accepter ce prix d’un montant total de 3 millions de dollars destiné à des chercheurs qui se sont distingués dans différents domaines de la médecine. C’est malheureux, que ce soient les pays de l’Union africaine, dont le dictateur assure la présidence tournante qui soient les plus chauds partisans du maintien de ce prix, que l’on devrait plutôt qualifié de la honte.
Voici le texte intégral de la lettre, tandis que la liste complète des 23 organisations et journalistes africains est accessible ici.
Le 29 février 2012
Les Membres du Conseil Exécutif
L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO)
Siège de l’UNESCO
7, Place de Fontenoy
75352 Paris 07 SP
France
CPI : Irina Bokova, Directrice Générale
Objet : Prix International UNESCO-Obiang Nguema Mbasogo pour la Recherche en Sciences de la Vie
Chers Membres Délégués du Conseil Exécutif
Nous soussignés organisations et journalistes Africains pour la protection des droits des medias, vous écrivons pour nous opposer sans équivoque au Prix International UNESCO-Obiang Nguema Mbasogo pour la Recherche en Sciences de la Vie et de vous demander de révoquer ce prix lors de votre prochaine session.
L’UNESCO étant une organisation qui championne la liberté d’expression et encourage la liberté des medias en particulier, ne devait jamais accepter le don de $3 million fait par le Président de la Guinée Equatoriale pour financer ce prix. Le régime du Président Obiang, au pouvoir depuis 32 ans, a systématiquement étouffé la liberté de la presse et a fait taire les voix critiques. Bien qu’un petit pourcentage de la population locale puisse avoir accès aux informations en provenance de l’étranger par le biais de l’internet et par les émissions de satellite, le gouvernement ne cesse de restreindre de main forte les activités de la plupart des medias et ainsi limite l’accès des citoyens à l’information. Les stations de radio et de télévision qui existent dans le pays sont les fiefs du gouvernement ou des membres de la famille du Président Obiang et l’ensemble de la section de la presse écrite qui sortent de manière régulière est contrôlé soit par l’état soit par les proches du président.
Les journalistes étrangers et locaux sont systématiquement harcelés, détenus et censurés. En février 2011 le gouvernement a interdit aux présentateurs d’émettre les rapports relatifs aux soulèvements du Printemps Arabe. Un présentateur de la radio d’état a été par conséquent suspendu pour avoir parlé de la Libye lorsqu’il était à l’antenne. En juin 2011 un équipage de télévision allemande ont vue leur séquences détruites avant d’être expulsé, ce, pour avoir filmé les quartiers pauvres de la capitale et pour avoir interviewé un avocat de la défense des droits humains et un membre du parti de l’opposition.
Nous avons appris que le Président Obiang a proposé une modification du titre du prix par la suppression de son nom, mais cela ne va pas effacer nos préoccupations du fait que son don de $3 million associe lui-même et les abus perpétré par son gouvernement à l’UNESCO, et de cette façon nuit à la mission précieuse de l’organisation. Nous avons également conscience du fait que ce fonds serait contaminé par la corruption du haut niveau dont la Guinée Equatoriale est renommée. Ce n’est pas un secret que les enquêtes toujours en cours en France et aux Etats Unis ont mené à la confiscation des biens de Teodoro Nguéma Obiang Mangue, le fils du Président. Des documents produits en matière des enquêtes séparées menées par le Sénat américain ainsi que le Département de la Justice des Etats Unis suggèrent une constante de corruption systématique au plus haut niveau du régime du Président Obiang. Malheureusement, les journalistes qui se trouvent au sein du pays ne peuvent pas rapporter ces faits étant donné les restrictions sévères qui leur sont imposées.
En tant qu’une organisation qui plaide pour “l’accès à l’information et à la connaissance” l’UNESCO ne doit pas accepter l’argent d’un leader dont les actions au cours des décennies font fi de ces principes. Nous vous encourageons à abolir en sa totalité ce prix Obiang de l’UNESCO et de mettre en œuvre de nouvelles directives susceptibles d’empêcher directement ou indirectement, dans l’avenir, la création des prix qui par intermédiaire de leur association aux individus ou gouvernements contredisent le mandat principal de l’UNESCO.
Related articles
- Activists Rally Against Africa Dictator’s UN Prize (abcnews.go.com)
- Activists protest UNESCO prize from African dictator (ctv.ca)
- Unesco’s latest attempt to give out dictator’s $3m prize delayed by lawyers (guardian.co.uk)
- Petrodollars and the African Curse: the Obiang Nguema Clan or the Triumph of Financial Debauchery (radical8.com)