Premier ministre depuis juin 2015, Lionel Zinsou a été désigné comme candidat du parti au pouvoir les Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE) par le chef de l’État Thomas Boni Yayi sortant et des députés des députés de la majorité, le 26 novembre dernier.
Redoutant sa compétence, il fait l’objet de toutes sortes d’attaques, même racistes, du fait d’être métis, d’avoir un brillant parcours international et des amitiés au sein du gouvernement et le patronat français.
Classé premier en 1978, à sa tentative d’agrégation ès sciences économiques et sociales, cet ancien élève de Laurent Fabius, qui l’appellera à ses cotés à Matignon en 1984 pour rédiger ses discours, a recouvert plusieurs postes prestigieux: associé-gérant de Rothschild & Cie avant de rejoindre en 2008 le plus gros fonds d’investissement français PAI Partners qu’il présidera de 2009 à 2015, animateur du club Fraternité, cercle de réflexion de Laurent Fabius, administrateur du comité opérationnel du journal Libération avant nommé en février 2015, pour diriger l’initiative AfricaFrance sous la forme d’une fondation, soutenue par le Quai d’Orsay et le MEDEF pour relancer les relations économiques entre la France et l’Afrique.
En tant que premier ministre, il vient de lancer un programme intitulé « lumière pour tous » pour doter d’un dispositif solaire les foyers béninois, en aidant financièrement ceux qui n’en auraient pas les moyens.
De tout ce magnifique parcours, ce qui intéresse le plus certains béninois, c’est que M. Lionel Zinsou est un blanc pour eux.
Le billet suivant de Chiara Ronca pour globalvoices.org, rédigé en anglais et traduit en français per Suzanne Lehn nous aide à comprendre les dessous de la polémique. Le titre original en français était: Le Bénin prépare l’élection d’un nouveau président.
Pour la première fois, une élection au Bénin n’est pas dominée par la personnalité du dirigeant historique du pays Mathieu Kérékou : celui qui a assuré la transition pacifique du Bénin de la dictature à la démocratie est mort en octobre 2015.
Le vote parlementaire est fixé au 26 avril, et les partis politiques se préparent à une campagne électorale.
Kerekou n’est plus là pour peser sur le processus, ce qui pimente l’intrigue pour de nombreux observateurs de la politique béninoise.
Après avoir tenté en vain de forcer une révision de la constitution qui lui aurait permis de se présenter pour un troisième mandat, l’actuel Président Yayi Boni, chef du parti Forces Cauris pour un Bénin Emergent (FCBE), a désigné candidat officiel du parti le premier ministre franco-béninois Lionel Zinsou.
Un candidat franco-béninois candidat du parti au pouvoir
Les portraits de Zinsou présentent un candidat inhabituel. Zinsou est né à Paris en 1953 de parents béninois. Ami du ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, Zinsou est professeur d’Economie à la renommée Ecole Normale supérieure de Paris de même qu’à Sciences-Po Paris. Il enseigne aussi à temps partiel à la London School of Economics. Sa réputation internationale est encore renforcée par son poste de Directeur Général d’un des grands fonds d’investissement français, PAI Partners, entre 2006 et 2011.
Sa candidature, officiellement déclarée le 27 novembre, a déjà littérallement fracturé le FCBE. Zinsou a lui-même admis sa médiocre connaissance du pays. Lors de sa nomination comme premier ministre il y a quelques mois, Zinsou déclarait à la radio internationale française RFI :
Je ne connais pas tout du Bénin. Donc, qui serais-je pour dire : ” J’arrive pour être le dauphin ” ? J’arrive pour écouter et j’arrive pour essayer d’être utile. [Le président] m’a demandé d’être le premier de ses ministres, m’a fixé des champs très précis et qui m’intéressent beaucoup, qui concernent le développement…
La candidature Zinsou est également contestée par les autres forces politiques. Le 5 janvier, une coalition de plusieurs partis et syndicats, menée par l’ex-Président Nicéphore Soglo, a condamné dans sa candidature un stratagème politique de la France. Zinsou, a dit Soglo à la BBC, est un “pion” imposé par les intérêts français.
Francis Laloupo, un journaliste spécialiste de géopolitique béninoise, a commenté :
Un commentateur a dit son déplaisir de l’intrusion indirecte de l’ex-puissance coloniale dans l’élection à venir :
Zinsou n’a même pas la légitimité il paie ses impôts où ? Le certificat de nationalité il l’a reçu quand en quelle année? …la France leur a promis [aux futures votants] la garantie de leur sécurité quoi qu’arrive ils sont tous prêts à céder leur patrie au colon.
Pour sa part, l’homme politique franco-béninois a commencé à se gagner le soutien de certaines catégories, comme les Zémidjans, les célèbres conducteurs de moto-taxis qui peuplent les rues des grandes villes du Bénin. Il y a quelques semaines, ceux-ci se sont mis à arborer les slogans de campagne des partis politiques et des candidats, et ceux de Zinsou étaient prédominants.
Victor Aidjihoundé, à la tête d’un groupe de Zémidjans, a déclaré :
Nous avons compris que les politiciens nous utilisent contre zéro franc. Seul Lionel Zinsou nous aide à trouver des solutions à nos problèmes. Il nous a dit : “Mutualisez vos forces, vous êtes nombreux au Bénin.” Il a commencé à travailler avec nous et nous sommes en bonne voie.
Les autres candidats
Les autres candidats de premier plan sont :
- Sébastien Ajavon, un ferme opposant au gouvernement de Yayi Boni. Il préside le groupe Cajaf-Comon, spécialisé dans la distribution alimentaire. Ajavon affirme qu’il n’est lié à aucun parti particulier et qu’il se présentera en indépendant.
- Abdoulaye Bio-Tchané, le candidat du parti Alliance pour un Bénin triomphant (ABT). Son programme consiste à revitaliser la capitale politique du Bénin, Porto Novo, éclipsée depuis des décennies par la capitale économique Cotonou.
Parmi les autres candidats les plus probables — les candidatures seront officiellement validées entre le 9 et le 12 janvier — il y a Patrice Talon, un homme d’affaires qui s’est spécialisé dans l’importation du coton de Côte d’Ivoire. Mais rares sont ceux qui croient au sérieux de sa candidature. Il vit en exil en France, sous le coup d’accusations de tentative d’empoisonnement en 2012 de l’actuel président. L’affaire n’a pas encore été portée en justice.