Certains chefs d’état africains ne reculent devant rien et font usage excessif de la force pour réprimer toute opposition de leurs citoyens à leur volonté de se maintenir au pouvoir. Tous les moyens sont bons pour parvenir à leur fin: modifications des constitutions, falsifications des processus électoraux, bourrages des urnes, distributions de cartes d’électeurs à des mineurs, etc.
Au Burundi
La communauté internationale est vivement préoccupée par la situation dans ce pays, où le Chef de l’Etat a lancé un ultimatum le 2 novembre par aux groupes de jeunes des quartiers dits contestataires de remettre leurs armes, faute de quoi son gouvernement utilisera tous les moyens y compris des avions pour rétablir l’ordre.
Le Ministre de l’intérieur et de l’éducation patriotique, Pascal Barandagiye, aurait avancer cette proposition quelque peu bizarre, selon le site iwacu-burundi.org:
« Si ces groupes de jeunes armés ne peuvent pas remettre leurs armes aux forces de l’ordre, qu’ils les rendent au moins aux prêtres ou aux pasteurs! »
Une des dernières victimes des meurtres et disparitions est Charlotte Umugwaneza, vice-présidente du parti d’opposition MSD pour le quartier de Cibitoke et militante anti-corruption. Après avoir identifié son corps sur des photos sa famille et ses proches accusent les services de renseignement.
Le site un.org, dans un article publié en juillet dernier, citait ce passage d’un discours par téléconférence du Prince Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, devant les membres du Conseil de sécurité de l’ONU, sur la situation au Burundi:
« La crise issue de la décision du Président Pierre Nkurunziza d’être candidat pour un troisième mandat a fragilisé une décennie de progrès constants dans la construction d’institutions démocratiques et de gains précieux en matière de sentiment d’appartenance à une communauté nationale commune … »
Des violences ont lieu toutes les nuits. Ainsi, dans la nuit de jeudi à vendredi 16 octobre, on a signalé des affrontements dans le quartier de Musaga. Deux jours plus tot, c’est au quartier de Ngagara que l’on déplorait onze victimes dont neuf civils parmi lesquels le cameraman Christophe Nkezabahizi et sa famille, abattus « de sang froid », selon un communiqué de l’ambassade américaine.
Le comportement irresponsable du Président Pierre Nkurunziza a provoqué la rupture de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi signé en l’an 2 000 par le pouvoir et des groupes armés constitués sur des bases principalement ethniques.
Le site irinnews.org rapporte :
« Les entretiens réalisés par IRIN auprès d’une dizaine de personnes – y compris des personnalités de la société civile burundaise, des analystes et des membres de l’armée – révèlent qu’un groupe d’anciens rebelles hutus s’est lancé dans une campagne de harcèlement, d’enlèvements, de détention et, dans certains cas, de meurtres contre des membres de la vieille garde de l’armée et des opposants présumés au président Pierre Nkurunziza, lui-même un ancien leader rebelle. »
Sans fournir aucune preuve des jeunes accusés par les autorités de vouloir rejoindre les rangs de groupes rebelles dans les pays voisins. Partant de ces accusations gratuites, les autorités sévissent. Dans un autre communiqué de presse, le Prince Zeid Ra’ad Al Hussein s’est préoccupé de l’augmentation alarmante du nombre d’arrestations, de détentions et de meurtres au Burundi depuis début septembre. Il dénonce:
presque chaque jour, des corps sans vie sont retrouvés dans les rues de certains quartiers de Bujumbura. Dans de nombreux cas, les victimes semblent avoir été tuées par des balles tirées à bout portant. Leurs corps portent parfois des traces de torture et sont souvent retrouvés les mains liées dans le dos ».
Le flux de réfugiés vers les pays voisins s’accélèrent. Il est passé de 100 000 en avril à 200 000 au début du mois d’octobre 2015. Les sanctions aussi pleuvent!
Autour du Président Nkurunziza s’est constituée une oligarchie de profiteurs qui sont entrain de s’enrichir en même temps que lui, laissant la population végéter dans la misère. C’est difficile d’avoir des chiffres précis ou récents sur les montants engrangés par le Président et sa cour.
Cependant, il y a un an, Gabriel Rufyiri, Président de l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques, l’Olucome, dénonçait la convention signée en mai 2014 pour l’exploitation de nickel dans l’est du Burundi, et qui serait entaché de corruption, pour cause de corruption. Cette convention avait été signée avec l’entreprise Samancor, en mai dernier, sous le nom de Burundi Musongati Mining sans appel d’offres. Selon l’Olucome, la compensation pourrait avoir été selon le nouvel avion qui a été offert au présidentiel burundais.
Pour M. Gabriel Rufyiri: « La corruption, le détournement, le vol des deniers publics sont devenus un mode de gouvernement à commencer. Nous lui demandons de changer cette façon de faire, cette façon de gérer la chose publique ».
Il est difficile de dire le contraire quand on consulte les données contenues dans le rapport de Transparency International sur l’Indice de perception de la corruption qui classe le Burundi 159ème sur 175 pays pris en compte.
Les pressions proviennent aussi bien de l’Union africaine que des Nations Unies, de l’Union européenne ainsi que des organisations humanitaires burundaises et internationales.
République du Congo
Les extravagances de l’oligarchie liée au dictateur congolais Denis Sassou Nguessou n’ont plus de limites. Comme je le publiais dans un billet publié en aout 2014:
« le Président Denis Sassou Nguesso, au Congo Brazzaville, épinglé dans le rapport sur les biens mal acquis, de l’ONG française, Comité catholique contre la faim et pour le développement-Terre Solidaire, détiendrait, avec sa famille, la moitié de l’économie du pays. Et ses membres se livrent à des dépenses de prestige personnel ou de folie de grandeur qui dépassent toute imagination. Ainsi, à titre d’exemple, Mme Antoinette Sassou-Nguesso, sa femme, aurait dépensé un million d’Euros pour fêter son 70ème à Saint-Tropez avec 150 invités, selon le quotidien Nice-Matin »
Autres illustrations:
Que faire alors pour se maintenir au pouvoir encore plus longtemps? Il a organisé le 25 octobre 2015, un referendum que l’opposition rejette, pour modifier la constitution. Pour être sur que les résultats correspondent à son vouloir, Sassou Nguessou n’a pas lésiné sur les moyens: interruption partielle de la téléphonie et des réseaux sociaux, campagne autorisée uniquement à ses partisans, violences et arrestations de figures de l’opposition et quadrillage des forces de sécurité.
Le gouvernement a publié des résultats peu crédibles, le 27 octobre: 72,44 pour cent des électeurs se sont rendus aux urnes et 92,96 pour cent des votants ont dit « oui » à ce nouveau projet de Constitution. Résultats immédiatement contestés par l’opposition ainsi que par la FIDH, l’OCDH et les organisations membres de la coalition #MonVoteDoitCompter.
Selon plusieurs observateurs, il est difficile d’avoir des résultats pareils, lorsqu’il y a eu des sièges électoraux qui n’ont pas été ouverts, et dans les autres, il n’y a pas eu de longues files d’attente, à part quelques unes où on voit des jeunes tous garçons le crâne rasé. Ce qui porte le site moutsinga.over-blog.com à se poser la question:
Bizarrement, connaissez-vous un endroit où tous les hommes ont des crânes rasés? Dans l’armée, les jeunes recrues ont souvent des crânes rasés dans les casernes de l’armée. Un vote de militaires?
Les mises en garde et les conseils, à la veille du référendum, se sont multipliés. Mais le pouvoir reste sourd. Devant les massacres et arrestations d’opposants à cette mascarade référendaire, l’Union africaine, l’ONU, l’Union européenne et les organisations militantes pour les droits humains ont dénoncé l’attitude des dirigeants congolais.
Sur le plan des violations des droits humains, avant le référendum, Chantal Uwimana, Directrice régionale pour l’Afrique à Transparency International avait averti:
« Le gouvernement doit préserver la liberté d’expression, le rôle de la société civile est plus que crucial à ce moment décisif pour la République du Congo. Peu importe la popularité d’un président, la volonté de changer la constitution est trop souvent le reflet de l’échec même du modèle de gouvernance et de la volonté de s’ac:crocher au pouvoir par des élites retranchées »
De tout temps lorsqu’un dictateur veut dévier l’attention de la population sur ses abus et crimes il fait vibrer la corde nationaliste, en trouvant des boucs émissaires.Pour mieux réussir son coup le Président Sassou Nguessou a trouvé ses boucs émissaires au sein des immigrés, en particulier la communauté de l’autre Congo, dont des dizaines de milliers de ses membres ont été chassés de son pays par la force ou obligés d’entrer en clandestinité.
Dans son rapport annuel 2014:15, Amnesty International dénonçait déjà:
De graves violations des droits humains, y compris des viols et autres violences sexuelles, des arrestations et des placements en détention arbitaires, des recours excessifs à la force, des tortures et d’autres mauvais traitments ont eu lieu, notamment pendant une vague d’expulsions forcées qui a visé des ressortissants de la République démocratique du Congo (RDC). La liberté d’expression, d’association et de réunion était soumise à des restrictions.
Plus de 179 000 étrangers de RDC, dont des réfugiés et des demandeurs d’asile, ont été renvoyés de force dans le cadre de l’opération policière Mbata ya Mokolo. Certains ressortissants de RDC restés sur le territoire sont entrés dans la clandestinité par peur d’être expulsés. L’opération policière, conduite dans toutes les villes du pays et selon toute apparence pour lutter contre l’immigration irrégulière et la criminalité, visait en particulier les Congolais de RDC.
Dans un communiqué publié le 1er juillet 2015, Amnesty International faisait savoir qu’elle s’inquiétait:
particulièrement des arrestations, des détentions et des expulsions du territoire qui ont eu lieu à Pointe-Noire depuis le lancement, le 14 mai 2015, de la nouvelle phase de l’opération Mbata ya Bakolo.
À la veille du référendum, le gouvernement a fait bloquer l’Internet mobile, les services de SMS et arrêter le signal de la radio française RFI, une des radios les plus écoutées en Afrique francophone.
Pour la liberté de presse, le Congo occupe la 107ème place du classement 2015 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.