Amadou Diallo a écrit le livre Le message de Teli Diallo en « utilisant les notes prises fébrilement à Boiro quasiment sous la dictée » de d’El Hadj Diallo Telli.
Aujourd’hui le parti unique n’est plus qu’un souvenir dans la quasi totalité des pays africains et les blocs qui dominaient le monde ont disparu. Mais les pouvoirs en place dans nos états se comportent comme si leur parti était le seul à exister. Ils monopolisent tout le pouvoir et tous les moyens de l’état, se souciant peu de rendre compte de leurs faits et gestes.
Pour ceux qui veulent approfondir, ce livre est disponible gratuitement et entièrement sur le site du Mémorial campboiro.org.
Le parti unique
Le parti unique qui est à la mode dans la quasi-totalité de l’Afrique ne doit plus être la solution politique de nos pays après presque deux décennies d’indépendance. Si parfois une force politique est parvenue à canaliser d’amples énergies humaines en vue d’atteindre de grands objectifs nationaux, la plupart du temps ses échecs économiques l’ont transformée en véritable guillotine.
Pour se maintenir au pouvoir, le parti unique n’hésite pas à sacrifier partiellement ou entièrement le développement économique et le bien-être social qui peut en résulter au profit d’armées dont l’équipement et les effectifs humains absorbent la plus grande partie du budget national. Dans les pays africains, la situation est dramatique car le développement économique est embryonnaire. Les relations internationales et tout particulièrement inter-africaines sont dominées par la présence massive de dirigeants qui sont parvenus au pouvoir par la force ou qui s’y maintiennent- par la force et qui de ce fait ne sont pas représentatifs. Il en *résulte un pacte du silence qui régit les rapports entre gouvernements. Ce pacte, il faut le dénoncer.
Il faut dénoncer le sacro-saint principe de non-ingérence dans les affaires des Etats. Des gouvernements authentiques, c’est-à-dire démocratiquement élus, et la communauté internationale sont de connivence avec ces États et entretiennent par le biais de la lutte entre les deux blocs idéologiques des dictatures de droite ou de gauche. Je voudrais m’appliquer à démontrer que cette complicité internationale est préjudiciable aux peuples et aux hommes.
Que l’on utilise le jargon « émulation socialiste » dans une économie dirigée ou « profit » dans une économie de marché, il n’en demeure pas moins vrai que les secteurs économiques non rentables sont restructurés ou supprimés par l’Etat bâilleur de fonds ou par les actionnaires. Il faut donc penser que dans les deux cas, l’Etat ou les actionnaires ont le droit de regard sur la gestion. Le résultat économique ou financier de toute entreprise humaine doit être la liberté, le bien-être social, la démocratie, la paix, la stabilité politique.
Dans les deux blocs, des gouvernements prélèvent des sommes folles sur le fruit des travailleurs pour entretenir des gouvernements dictatoriaux à leur dévotion, sous forme d’aide au développement. Si je tiens pour acquis que la véritable souveraineté d’un État passe par la complémentarité avec le reste du monde, force est de reconnaître que l’apport des dictatures au monde qui les entoure est loin de répondre au volume des aides qu’elles reçoivent pour se maintenir contre la volonté de leurs peuples. Elles n’ont jamais hésité à diriger tout le poids de leurs armées contre des peuples souvent très éloignés du lieu où elles sont implantées.
La communauté internationale refuse d’assainir ses organes de décision et s’enlise dans des formules juridiques afin de ne pas condamner explicitement telle ou telle action de gouvernements tyrans. Parallèlement des hommes et des peuples se battent seuls et meurent seuls. On assiste à une double conspiration des gouvernements bâilleurs de fonds : contre les travailleurs de leurs pays qu’ils privent du profit de leur travail au bénéfice de dictatures impitoyables, contre les populations au nom desquelles des moyens financiers sont réunis mais qui en fait sont réprimées quand ce n’est pas massacrées, « grâce » précisément à ces moyens financiers accaparés au passage par les tyrans.
A mon avis, les gouvernements démocratiques des pays riches et la communauté internationale devraient réviser leur politique d’aide et prendre la décision de ne l’accorder qu’à des gouvernements qui permettent – ne serait-ce que d’une manière embryonnaire – une vie démocratique, l’exercice de la liberté, des libertés pour les populations qu’ils sont censés représenter. Car, là où la liberté et la démocratie sont absentes, ce n’est pas seulement l’absence de liberté et de démocratie qui caractérise la situation, mais ce sont évidemment l’anti-liberté et l’anti-démocratie qui ont pris le pouvoir.
Seuls des gouvernements animés d’une grande volonté politique pour l’avènement du socialisme dans la liberté travailleront à l’élaboration d’un code de conduite internationale dont l’observance fera tomber en désuétude cette complicité qui ne profite qu’au capitalisme et au communisme. Malgré le nombre limité, au sein de la communauté internationale, d’authentiques gouvernements socialistes, des expériences nées ici et là se ramifieront et parviendront à créer une solidarité répondant aux aspirations des peuples soumis jusqu’à ce jour au grand capital et à la dictature communiste.
Les maigres résultats politiques, économiques et sociaux enregistrés par les organisations interafricaines et internationales attestent que la grande majorité des gouvernements ont jusqu’ici fourni des statistiques économiques et sociales fausses. La situation au Moyen-Orient, en Afrique du Sud, en Namibie, la persistance du régime de l’apartheid, la situation au Sahara, au Tchad… prouvent que la Communauté Internationale qui a charge de veiller à notre sécurité et à la paix n’a ni le pouvoir, ni les moyens des dignes objectifs qu’elle s’est fixés.
Lorsqu’on pense que les clés des grands problèmes mondiaux sont entre les mains de quelques gouvernements égoïstes, le nouvel ordre économique mondial, finalité de la conférence nord-sud, me paraît utopique. Le Tiers monde, et l’Afrique tout particulièrement, aborderont ce dialogue avec deux handicaps : le manque de courage politique de la majorité des dirigeants africains les a privés d’une quelconque autorité politique. Ils ne représentent rien ou pas grand-chose. Le second handicap découle du premier. Ces dirigeants sont incapables de faire participer leurs peuples à une grande production agricole et industrielle. Or, l’ordre mondial actuel repose sur le pouvoir économique. Pouvoir dont les pays africains sont exclus.
A cette description, il faut ajouter le problème des réfugiés. L’Afrique détient le nombre record des réfugiés dans le monde. Cela est à lier avec l’existence des dictatures dont j’ai parlé. Devant cette situation, la communauté internationale, les gouvernements se réfugient derrière le rideau du pacte du silence qu’est la non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Pendant ce temps de bonnes volontés collectent des fonds pour nourrir ce produit de la faillite de l’entreprise humaine. Personne n’ose en les dénonçant s’attaquer et guérir ce mal du siècle : les dictatures.