Ce billet est extrait d’un encadré du livre que Diallo Siradiou a écrit en 1985 pour les éditions Jeune Afrique, intitulé Sékou Touré: Ce qu’il fut. Ce qu’il a fait. Ce qu’il faut défaire. Celui qui a narré cette histoire que raconte ici Siradiou Diallo est Marcel Julien Ropert libéré du camp Boiro en 1974. |
On me donne un papier imprimé sur lequel figurent trois colonnes : 1. S.D.E.C.E. ; 2. S.S. Nazis ; 3. C.I.A., et l’on me demande de signer. A mon refus, on me fait conduire dans la pièce attenante où j’ai une minute « pour réfléchir ». Ce délai écoulé, on m’entraîne vers la « Cabine Technique ».
Deux hommes me lient à nouveau les coudes dans le dos avec du fil électrique. Puis, on me place les pinces de la magnéto sur les seins et l’opérateur commence à tourner la manivelle — génératrice de courant. Entre les cris de souffrance, je proteste mais la séance continue. Les tortionnaires m’engagent à parler, sinon disent-ils, ils vont « m’esquinter pour rien, Tu es jeune et étranger. On pardonne facilement dans ce cas ». Ma résistance vaincue, je leur dis que je vais signer. On me détache et je signe dans la colonne S.D.E.C.E.
[…]. On me dit alors de signer aussi pour S.S. Nazis. Je refuse. Alors on me reprend pour m’attacher à nouveau. Comprenant que c’est inutile de résister encore, je signe.Le lendemain vers 8 heures, on me transfère à la cellule 8 précédemment occupée par Drablier qui se trouve en ce moment à la diète, à la cellule 75. A la fin de la journée, on me ramène à la cellule 10 où Lepan est content de me retrouver.
Vers minuit, on vient à nouveau me chercher et on me conduit directement à la « Cabine Technique ». […] Mes aimables hôtes me disent : « Il reste une colonne où tu n’as pas signé : la C.I.A. » Ayant repris du courage au cours de ces vingt-quatre heures, je déclare que je refuse de signer. Alors on m’attache à nouveau les coudes très serrés puis on me fait asseoir dans un pneu de voiture. Là on me lie les chevilles et on réunit ce lien à mon cou à l’aide d’une cordelette de manière à m’interdire tout mouvement. Alors, complètement brisé, j’accepte.
Je crois que j’aurais signé ma propre condamnation à mort pour en finir…