Ce billet a été écrit par Alain GAUTHIER, que l’on voit dans cette video en compagnie de son épouse) président du Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda (CPCR) et publié le 6/07/2019 sur le site du CPCR. Il traite de la situation judiciaire de Fabien NERETSE, accusé d’avoir participé au génocide des Tutsis, il y a 25 ans, au Rwanda. Il fait le point sur les poursuites d’autres accusés vivant en France.
C’est en octobre prochain que Fabien NERETSE devrait enfin rendre des comptes à la justice des hommes: il comparaîtra devant les assises de Bruxelles pour génocide.
Le CPCR se réjouit de cette décision, même si, pour les familles de victimes, elle puisse paraître tardive. En 2000, le CPCR (Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda), qui a déjà permis trois condamnation en France pour génocide, avait déposé une plainte, mais NERETSE n’ayant pu être localisé sur le sol français, les enquêtes avaient été interrompues.
Quelques années plus tard, le CPCR avait déposé une nouvelle plainte (2008) et avait fini par débusquer Fabien NERETSE à Angoulême où il vivait sous le nom de son père, NSABIMANA. Cette révélation avait beaucoup surpris son entourage dans la mesure où, comme la plupart des personnes soupçonnées d’avoir participé au génocide des Tutsi, il s’était refait une virginité et s’était inséré dans le tissu associatif de sa ville d’adoption. D’autant plus qu’on s’apprêtait à lui confier des responsabilités au sein d’une des associations de la cité.
Poursuivi aussi en Belgique pour le meurtre des membres de la famille de Martine BECKERS, un juge belge avait alors émis un mandat d’arrêt européen en juin 2011.
Arrêté le 29 juin 2011, il sera aussitôt interrogé par des enquêteurs belges et le 30 août suivant, les juges français décideront d’extrader le prévenu vers la Belgique où il semblerait que le dossier ait été plus avancé.
Il aura fallu attendre 8 ans pour que NERETSE soit enfin jugé, 8 ans au cours desquelles il a continué à vivre dans sa ville d’adoption. Le prévenu sera jugé avec deux autres de ses compatriotes, Ernest GAKWAYA et Emmanuel NKUNDUWIMYE.
Le CPCR s’impatiente de voir se tenir aussi en France des procès d’assisses. Claude MUHAYIMANA, déféré devant les assises de Paris, décision confirmée en appel, s’est pourvu en cassation. Nous attendons la décision. Laurent BUCYIBARUTA, ancien préfet de Gikongoro résidant à Saint-André les Vergers, et Sosthène MUNYEMANA, médecin urgentiste à Villeneuve-sur-Lot, ont eux aussi fait appel de leur déferrement devant la Cour d’assises.
On s’interroge également sur l’avancée de plusieurs instructions ouvertes contre plusieurs personnes soupçonnées d’avoir participé au génocide des Tutsi: Charles TWAGIRA, médecin à Kibuye en 1994, Agathe KANZIGA, épouse HABYARIMANA, Manassé BIGWENZARE, 83 ans, Laurent SERUBUGA, ancien chef d’Etat major adjoint en 1994 en résidence dans un village du Nord de la France et lui aussi d’un âge relativement avancé, Eugène RWAMUCYO, autre médecin qui a traversé la frontière belge, Isaac KAMALI, visé depuis dix ans par une plainte du CPCR… et plusieurs autres (voir sur le site du CPCR). Notre inquiétude est légitime dans la mesure où le temps joue en faveur des bourreaux. Si un seul procès se déroule tous les deux ans (sans compter les appels systématiques que font les condamnés) beaucoup de ces personnes échapperont à la justice. Ce que les familles de victimes ne pourraient supporter.
Alain GAUTHIER, président du CPCR