Après un an depuis la prise de pouvoir du Président américain Donald Trump, les africains s’inquiètent de certaines de ses prises de position. Lova Rakotomalala, responsable des contenus originaux concernant les pays francophones publiés sur Global Voices, présente son point de vue.
Le président des États-Unis Donald Trump a annoncé que les USA reconnaissent dorénavant Jérusalem comme la capitale de l’État d’Israël. Cette décision controversée a fait réagir de nombreux pays inquiets des conséquences de cette proclamation et le continent africain n’est pas en reste. L’Union Africaine a réagi par un communiqué, questionnant la justesse de la décision de Washington et réaffirmant la solidarité des pays africains avec le peuple palestinien. De même, l’Égypte et le Sénégal ont saisi le conseil de sécurité des Nations Unies pour faire part de leurs inquiétudes sur les conséquences de cette décision.
Des manifestations en solidarité avec la Palestine ont été organisées en Égypte, en Tunisie et au Maroc.
Karim Ben Said, auteur pour le quotidien La Presse à Tunis, rapporte ainsi que de nombreuses manifestations se sont produites dans toute la Tunisie :
Trump donne aujourd’hui l’occasion aux peuples arabes et musulmans de reprendre conscience de l’enjeu d’une telle décision. Par ces manœuvres, le président des États-Unis prône implicitement l’expulsion des Palestiniens de leurs terres et réveille en conséquence la rage des peuples arabes. En témoigne la mobilisation spontanée, hier, de centaines de jeunes étudiants et lycéens sur la principale avenue de Tunis, l’Avenue Habib-Bourguiba.. Les manifestations hostiles à la décision de Donald Trump et de son Administration ont également eu lieu dans plusieurs autres gouvernorats de la Tunisie. Dans toutes les villes, ce sont les jeunes qui se sont mobilisés plus que les adultes. Les mêmes scènes se sont répétées à Sidi Bouzid, à Tozeur, à Kébili, à Gafsa et dans d’autres régions de la Tunisie. Dans toutes ces manifestations, le drapeau palestinien a été l’invité d’honneur et hissé à bout de bras.
En Mauritanie, Dia Cheikh Tidiane, directeur de publication du Rénovateur quotidien, peine à comprendre cette décision :
C’est le comportement très peu diplomatique d’un homme dont la vision et la politique sont faussées par une méconnaissance totale du monde extérieur. Une ignorance qui explique le fait qu’il souffle sur les braises du vieux conflit du Moyen-Orient
En Afrique sub-saharienne aussi, l’incompréhension règne. De nombreux observateurs se posent la question du bien fondé de cette décision et de son impact sur la stabilité du moyen-orient. Hugues Richard Sama, éditorialiste dans le quotidien burkinabè L’Observateur se demande quel est le rationnel derrière cette proclamation:
Au nom de la paix, Trump doit partir avant de commettre des dégâts plus désastreux. Il y a comme une forme de folie et d’irresponsabilité chez le chef de l’exécutif américain dont on se demande parfois s’il maîtrise les enjeux internationaux. Quand bien même les États-Unis auraient toujours soutenu leur protégé israélien, ils l’ont toujours fait avec une dose d’intelligence, de realpolitik. Et voici que ce septuagénaire aux cheveux peroxydés sorti d’on ne sait quelle planète, parachuté de sa Trump Tower dont il n’aurait jamais dû descendre, vient de briser un tabou et de rompre un consensus qui, même fragile, avait au moins le mérite d’exister
Le Sénégal est un des pays à avoir réagi officiellement à l’annonce de Trump. Historiquement, le Sénégal a toujours été solidaire de la cause palestinienne. Ainsi, un collectif Solidarité Sénégal Palestine existe depuis quelques décennies pour affirmer leur préférence à une solution à deux États dans la région. Madieye Mbodj est coordinateur de ce collectif et il condamne fermement la décision du président Trump.
Si nous laissons Donald Trump violer des résolutions internationales, qui dénonçaient justement la colonisation israélienne, y compris l’occupation de Jérusalem, nous pensons que ce serait une grave violation des droits du peuple palestinien, mais surtout, une incitation à la guerre.
Enfin, au Kenya, le Dr Monda, professeur de sciences politiques, tente d’évaluer les raisons et les conséquences de ce choix:
Cette décision fait le jeu des éléments de la coalition conservatrice menée par le Likoud en Israël. M. Trump cherche sans doute à renforcer sa base électorale et à élargir ses alliés dans la communauté juive américaine en Amérique à l’approche de l’élection présidentielle de 2020. Cependant, cette initiative pourrait se retourner contre lui parce qu’il a tendance à changer brusquement de position sur des questions d’actualité. Cela met également les alliés américains comme le Kenya dans une position précaire. J’aurais aimé que Trump se rappelle les réflexions d’un autre président américain sur la politique étrangère, Thomas Jefferson qui est résumée dans cette citation: “Un esprit de justice et de consensus à l’amiable est de notre devoir et aussi dans notre intérêt et devrait être encouragé avec toutes les nations”.
Ce billet a été publié en premier sur globalvoices.org le 11 décembre2017. Il est de mon ami Lova Rakotomalala, responsable des contenus originaux concernant les pays francophones publiés sur Global Voices. Son compteTwitter : twitter.com/lrakoto. Son blog personnel : http://rakotomalala.blogspot.com/