Le Vatican est en cette période secoué par une série de scandale et de comportements de la part des membres de la Curie, au plus haut niveau. Ces comportements vont à l’encontre de la vision du Souverain pontife de réduire le luxe de certaines personnalités: train de vie digne de stars du sport ou du cinéma, détournement de fonds, compromissions avec des milieux proches de la mafia, etc.
Cet aspect m’intéresse moins, n’étant pas chrétien. Mais par contre, les opinions qu’il a émises dans ses discours lors du récent voyage qu’il a effectué à Cuba et aux États-Unis vont bien-audela des problèmes du Vatican et de toute confession religieuse, à mon avis.
La journaliste Anita Bourdin rapporte des extraits de son homélie sur la place de la Révolution à la Havane, sur le site zenit.org:
Le pape a préconisé de servir non pas « les idées » mais « les personnes », en particulier « les plus défavorisées ». « L’importance d’un peuple, d’une nation, l’importance d’une personne se fondent toujours sur sa manière de servir ses frères les plus fragiles …
Le souverain pontife a salué le peuple cubain, « un peuple qui a le goût de la fête, de l’amitié, des belles choses, mais aussi un peuple qui sait avoir les bras ouverts », et il a invité les Cubains « à soigner cette vocation, à soigner ces dons que Dieu [leur] a donnés ».
Aux États-Unis, après l’aéroport de Washington, M. Barack Obama et son épouse ont reçu le Pape François à la Maison Blanche, devant près de 20 000 personnes. Le souverain pontife a annoncé la couleur sur les thèmes qu’il aurait abordés pendant son séjour. Sur le site guyaweb.com David Herbaut relève:
…en tant que fils d’une famille d’immigrants, je suis heureux d’être invité dans un pays construit par de telles familles….
Une allusion à l’intense débat qui secoue les Etats-Unis au sujet de l’immigration et de la régularisation de plus de 10 millions de sans-papiers, majoritairement latino-américains, comme l’est lui-même le pape.
S’il voulait apporter son aide au président américain, il n’aurait pas pu utiliser de meilleurs propos, sur plusieurs sujets auquel son hôte est confronté. Par exemple, comme le rapporte le site atlasinfo.fr il a salué l’initiative de l’administration Obama en matière d’environnement:
Le Pape François a tenu à exprimer son soutien aux « initiatives audacieuses et ambitieuses » de l’administration Obama visant la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la protection de l’environnement.
Sur la même lancée, devant le Congrès américain, il est revenu sur le thème de l’intégration des immigrés et il a aussi évoqué le souvenir de la marche de Martin Luther King, en 1965, pour les droits civiques des noirs, entre Selma et Montgomery, en Alabama. Sur le site slate.fr Henri Tincq, dans un article intitulé Le « I have a dream » du pape François au Congrès américain, reprend ses propos:
Moi, dit le pape Bergoglio, et pour beaucoup d’entre vous parlementaires américains, nous sommes tous des enfants d’immigrés. De ces immigrés qui ont bâti votre pays, un pays de libertés… Ne recommençons pas les erreurs du passé. Ne reculons pas devant leur nombre, mais regardons leur histoire, de manière humaine, juste, fraternelle.»
Le pape vise juste au cœur patriotique des Américains, loue la grandeur de leurs luttes d’émancipation, leur diversité ethnique, leur capacité historique à intégrer.. Elle [la marche de pour les droits civiques] continue de nous inspirer, assure-t-il. Pour lui, la règle d’or de toute vie humaine, c’est de «faire à l’autre ce que tu voudrais que l’autre fasse pour toi. Il faut traiter les autres avec la même passion et la même compassion que nous voudrions que les autres nous traitent»
fr.igihe.com souligne comment avec un langage direct il a abordé tous les débats qui traversent la société américaine et il a séduit les membres du Congrès:
Le pape François a abordé dans un langage très direct tous les débats qui traversent la société américaine et le Congrès. Des sujets de controverses sur lesquels les élus sont loin de s’entendre. L’abolition de la peine de mort, par exemple, car « toute vie est sacrée ». Ou les ventes d’armes qui infligent « des souffrances inqualifiables et génèrent de l’argent trempé dans le sang ».
Devant les délégations venues de tous les pays pour participer à l’Assemblée générale de l’ONU, il a repris les thèmes de l’écologie, des droits humains, de l’immigration, de l’exclusion sociale et de la gouvernance:
L’abus et la destruction de l’environnement sont en même temps accompagnés par un processus implacable d’exclusion. …L’exclusion économique et sociale est une négation totale de la fraternité
humaine et une très grave atteinte aux droits humains et à l’environnement. Les plus pauvres sont ceux qui souffrent le plus de ces atteintes pour un triple motif grave : ils sont marginalisés par la société, ils sont en même temps obligés de vivre des restes, et ils doivent subir injustement les conséquences des abus sur l’environnement. Ces phénomènes constituent la ‘‘culture de déchet’’ aujourd’hui si répandue et inconsciemment renforcée.
Il a rendu hommage aux hommes et femmes qui ont servi loyalement l’ONU, au cours de ses 70 ans. Il a rappelé la nécessité de procéder à la réforme et à l’adaptation de l’ONU. Il a traité de l’Agenda 2030 pour le Développement Durable’’, qui commençait le jour de sa visite et il a exprimé le souhait que la Conférence de Paris sur le changement climatique aboutisse à des accords fondamentaux et efficaces. Il a ajouté:
Cependant, les engagements assumés solennellement ne suffisent pas, même s’ils constituent un pas nécessaire aux solutions. La définition classique de la justice, à laquelle je me suis référé plus haut, contient comme élément essentiel une volonté constante et permanente : Iustitia est constans et perpetua voluntas ius suum cuique tribuendi [La justice est la volonté constante et perpétuelle de donner à chacun son droit?].
Le monde réclame de tous les gouvernants une volonté effective, pratique, constante, des pas concrets et des mesures immédiates, pour préserver et améliorer l’environnement naturel et vaincre le plus tôt possible le phénomène de l’exclusion sociale et économique
C’est la partie du discours du Pontife condamnant toutes les formes d’esclavage, son appel en faveur des réfugiés et du respect des peuples autochtones qui a retenu l’attention de Le blog de paroissiens-progressistes. Il a écrit:
Il a appelé à « éliminer les nouvelles formes d’esclavage » et à répondre à « une crise de réfugiés d’une ampleur inconnue depuis la Seconde Guerre mondiale ». « Sur ce continent aussi, des milliers de personnes sont portées à voyager vers le nord à la recherche d’une vie meilleure. Nous ne devons pas reculer devant leur nombre » mais « répondre d’une manière toujours humaine, juste et fraternelle » à leur situation, a-t-il plaidé. Il a par ailleurs reconnu que, « tragiquement, les droits de ceux qui étaient ici longtemps (les Indiens) avant nous n’ont pas été toujours respectés ». À ces peuples, il « souhaite réaffirmer (s)a plus haute estime ».
Au courant de sa dernière journée aux Etats-Unis, il a rendu visite à des détenus de la Prison Curran-Fromhold, une prison de haute sécurité de la banlieue de Philadelphie, où sont enfermés près de 3000 prisonniers. Il y a rencontré une centaine de ces prisonniers leur apportant des mots de réconfort et de proximité tout en dénonçant une société qui ne ferait rien pour réhabiliter ses détenus. Herve Gilbert rapporte sur site trans-caribbean.blogspot.it:
Cela fait mal de voir les systèmes carcéraux qui ne se préoccupent pas de soigner les blessures, a lancé François, de soulager la peine, d’offrir de nouvelles possibilités. Cela fait mal de voir des personnes qui pensent que ce sont seulement les autres qui ont besoin d’être nettoyés, purifiés
On n’a pas besoin d’être chrétien, en particulier catholique, pour partager ces positions. Les gouvernants du monde les apprécieront-ils?