Le vote ethnique a joué un grand role dans ces élections présidentielles. En effet, en considérant l’appartenance des deux leaders arrivés en tête, les proportions dans la composition ethnique de la population guinéenne sont à peu près respectées.
En l’absence de données crédibles, si on considère celles fournies par le site de la CIA, Cellou Dalein Diallo, arrivé premier, appartient au groupe ethnique peulh qui rassemble 40 pour cent de la population, alors que le prof. Alpha Condé, arrivé en deuxième position, est issu de l’ethnie malinké, le deuxième groupe plus nombreux de la population.
Avec à peine un peu plus de 20 pour cent, il n’a peut-etre pas fait le plein de l’électorat de son ethnie, qui est de 30 pour cent de la population, parce qu’il y avait plus d’un candidat qui en sont originaires. En outre étant un des plus anciens opposants au régime dictatorial de l’ancien président Conté, sa candidature soulève des rejets chez nombreuses personnes au sein même de son ethnie même. Sur le plan idéologique, il est jugé extrémiste et partisan de la manière forte lorsqu’il n’arrive pas à convaincre avec les arguments. Ce qui a joué en sa défaveur.
Même le candidat de l’UFDG, M. Cellou Dalein Diallo, n’a pas fait entièrement le plein de « son » électorat ethnique. Dans son cas la différence devrait être due, en plus de la présence d’autres candidats de son ethnie, qui n’ont obtenu que des miettes, au fait que le candidat de l’UFR, M. Sidya Touré, ait enregistré le score exceptionnel de 15,5 pour cent, qui va bien au-delà de l’importance démographique de son ethnie d’origine, les djakankés. Dans la culture guinéenne et ouest-africaine, en général, cette ethnie et les Peulhs se considèrent comme cousins et sont assez proches et nourrissent une amitié qui remonte à plusieurs siècles. Naturellement, les 15,5 pour cent qu’il a enregistrés ne s’expliquent pas entièrement par le report sur son nom d’une partie de l’électorat peulh, mais les souvenirs d’un approvisionnement plus régulier de la ville de Conakry en électricité accompagnée d’une amélioration des performances économiques du pays pendant la période qu’il a été Premier ministre.
Ces résultats devraient indiquer aussi que les irrégularités qui ont été dénoncées, plus par les leaders des principaux partis que par les observateurs internationaux, n’ont pas eu une réelle influence dans l’ensemble des résultats.
Espérons maintenant que M. Diallo et Condé sauront tenir le langage de la non-violence, du respect du choix de chacun et se rappèleront que des propos inconsidérés de leur part peuvent avoir des conséquences qui pourront conduire le pays à la guerre civile. Ils doivent savoir se respecter et prôner la tolérance. La crainte ne vient pas de ce que le peuple pourrait faire, mais de leur capacité à respecter le choix populaire.