Après l'attaque du 14 juillet à Nice, le tourisme est en berne
Ce 24 juillet, après un tour matinal dans le quartier du Vieux Nice, le long de la Promenade des anglais et le Cours Saleya, le centre des activités touristiques de la ville, je rentre chez moi, le coeur lourd. D’habitude, le dernier dimanche de Nice est très animé, coincé entre le chassé croisé des juilletistes et des aoutiens. Mais aujourd’hui le coeur n’y est pas, la grande foule non plus.
Il y a moins de monde et l’atmosphère n’est plus à la joie. Les restaurants, comme La Voglia, Di Più et la Favola, du Cours Saleya où on faisait la queue à toute heure pour avoir de la lace ne sont plus pleins. Ces 3 restaurants, qui servent des spécialités italiennes, sont parmi les plus populaires. Ils offrent un cadre et un couvert personnalisés et une nourriture appréciable à des prix compétitifs. Ils ne prennent pas de réservation, mais les autres années, il y avait toujours de longues devant leurs entrées.
L’année dernière, de nombreux touristes ayant renoncé à aller au Maghreb ou en Égypte, à cause des attentats, avaient envahi la Cote-d’Azur. Sur la Prom’ ou les terrasses des cafés, à pareille époque de la saison, on entendait plus les langues étrangères que le français. L’absence des chinois et des russes est particulièrement criarde.
D’habitude en été, les évènements commerciales, culturelles et sportives se succèdent pour agrémenter le séjour des touristes. Le premier et le plus prestigieux évènement à en faire est le Nice Jazz Festival pour célébrer le premier évènement de cette nature qui a eu lieu dans cette ville en 1948. Il devait durer du 16 au 20 juillet et un nombre record 60 000 spectateurs étaient attendus. Parmi les stars planétaires attendues, il y avait Robert Plant, Youssou NDour, Massive Attack, Parov Stelar mais aussi Ibrahim Maalouf, Snarky Puppy, Brigitte, Avishai Cohen, Deluxe…
La compétition Europétanque des Alpes-Maritimes qui devait se dérouler du 23 au 25 juillet 2016 à Nice est une autre victime de l’agression barbare du 14 juillet. Il était prévu que près de 3 000 boulistes provenant du monde entier, auraient pris part à la manifestation qui se seraient affrontés sur la Promenade des Anglais et l’esplanade De Lattre de Tassigny. Les spectateurs attendus étaient près de 50 000 spectateurs attendus, passionnés et curieux, cet événement rencontre un franc succès populaire.
Les conséquences économiques de ce désastreux acte criminel sont énormes et se feront sentir bien au-delà de la région. Dans mon article ci-dessous, écrit pour globalvoices.org, révisé par mon ami Lova Rakotomalala.
C’est vrai que malgré cette déprime, nous sommes dans une situation enviable par rapport aux régions du monde où la guerre et la pauvreté sont le lot quotidien des population depuis des années. Ma solidarité va à elles, toutes, où qu’elles se trouvent.
L’attentat du 14 juillet, n’a pas seulement plongé Nice dans l’angoisse et l’horreur, elle a aussi impacté négativement un secteur touristique déjà en ballotage. Le choc économique ne sera pas comparable à ceux des autres villes touristiques frappées récemment par le terrorisme telles que Grand-Bassam en Côte d’Ivoire, Sousse à Tunis et Charm el-Cheikh en Egypte mais mais cette tragédie porte certainement un coup dur à un secteur en difficulté en France.
Nice et ses environs tirent d’importants revenus du tourisme. Tout ce qui peut affecter négativement ce secteur a de sérieuses conséquences sur les activités économiques de la région. Après Paris, Nice est la ville la plus visitée de France.
Selon les données de l’Office de tourisme, en 2015, la ville de Nice a attiré 40 % des 5 millions de touristes qui ont visité la Côte d’Azur, générant près de 1,5 milliard d’euros de retombées économiques annuelles. Le secteur touristique représente 40 % du PIB de la région et emploie 119 000 salariés. Rien que la taxe de séjour lui a rapporté en 2014, la somme de 33 millions d’euros.
Le site de référence touristique industrie-hoteliere.com rapporte que:
Le président du syndicat des hôteliers Nice Côte d’Azur, Denis Cippolini évoque « de nombreuses annulations » et il considère que « la saison d’été et celle d’hiver vont être impactées avec des conséquences sur l’emploi ».
Pour les professionnels du secteur des industries hôtelières de la Côte d’Azur, l’enjeu va bien au-delà de la seule saison touristique estivale 2016. L’ensemble des hôteliers, restaurateurs et cafetiers s’accordent à dire que l’impact sera aussi ressenti aux villes alentours comme Cannes, Antibes/Juan les Pins ou Monaco, tant la Côte d’Azur est perçue, notamment à l’international, comme une seule et même destination. ….
Avec la répétition des attentats meurtriers sur le sol national depuis le début de l’année 2015, les professionnels du secteur du tourisme constatent un recul sensible de la fréquentation hôtelière, notamment de la clientèle en provenance des Etats-Unis, du Moyen-Orient et d’Asie.
Cette crise arrive au moment où grâce au championnat européen de football des nations de l’Euro2016, le tourisme commençait timidement à se reprendre après le choc provoqué par les attentats à Paris en 2015. Touriscope, le site de l’Observatoire du Tourisme de la Côte d’Azur relève ainsi que:
Le rebond est encore plus net sur le chiffre d’affaires généré par cette clientèle, dont la dépense remonte à près de 200€/jour (124€ l’an dernier sur la même période). Dans les hébergements marchands, l’hôtellerie 2-3* et les résidences de tourisme souffrent d’un certain déficit de la demande Loisirs (-5 points d’occupation en Mai), mais la tendance apparaît bien meilleure dans l’hôtellerie 4-5 étoiles
Sur ce segment, la fréquentation en nuitées est restée stable aussi bien en Mai que sur les 5 premiers mois de l’année
La progression des étrangers en 4-5 étoiles (+4%) a compensé la baisse des nuitées françaises. Sur le seul segment Luxe, le revenu par chambre disponible (RevPar) progresse de 8.5% sur les premiers mois de l’année, à 182€ HT (hôtellerie urbaine).
L’impact économique va bien au-delà de la ville de Nice. Le site 2012un-nouveau-paradigme.com donne des chiffres sur les pertes à la bourse des valeurs de Paris:
À Paris, le secteur du tourisme et du transport était sous pression, sanctionné par les investisseurs. Un peu avant 10 heures, le groupe hôtelier AccorHotels perdait 3,39% à 37,29 euros, le loueur de voitures Europcar 3,60% à 7,25 euros et le groupe aérien Air France-KLM 2,05% à 5,88 euros. Eurotunnel perdait 0,73% et ADP 0,43%. Globalement, l’indice européen du tourisme et du transport, parmi les plus fortes baisses sectorielles, abandonne 0,66%.
Le secteur du tourisme «devrait subir de plein fouet les conséquences des atrocités commises à Nice, zone très touristique en cette période estivale», prévient le courtier Aurel BGC, rappelant que «le tourisme pèse plus de 7% du PIB français». Le courtier souligne que le secteur «commençait tout juste à relever la tête en France, en particulier après un Euro de football qui s’est déroulé sans incidents notables (à l’exception des batailles entre hooligans à Marseille) et avait, d’après les échos transmis par la presse, permis de relancer les réservations de dernière minute dans le pays».
Mais la France n’est pas le seul pays affecté par ses attaques au niveau touristique.
Mohamed Rial, blogueur marocain sur le tourisme au maroc, exprime ses craintes sur l’amalgame qui pourrait être fait à cause de l’appartenance religieuse ou l’origine maghrébine du terroriste. La crainte générée par ses crimes pourrait produire des effets collatéraux qui affecterait des villes touristiques comme Marrakech :
Mais les effets des attentats seront aussi collatéraux pour une ville comme Marrakech, dont le cœur de l’activité économique n’est autre que le tourisme. Quoi de plus normal pour une destination dont l’Hexagone constitue le premier marché pourvoyeur, avec 40% des flux. Depuis 2012, la ville ocre, tout comme Agadir, souffre d’un désamour des touristes français, qui s’accentue d’année en année. En raison, justement, de ces attentats et des amalgames qu’ils suscitent dans l’esprit des voyageurs.
D’après le dernier rapport annuel du Syndicat français des entreprises des tour-opérateurs (Seto), l’un des premiers fournisseurs de voyages à forfait (vol+séjour) pour le Maroc, la clientèle du business français du voyage se réduit comme peau de chagrin. En juin dernier, les premières tendances pour la saison estivale affichaient un recul de 38% pour le Maroc au profit du Portugal, des Baléares et de l’Italie.
C’est dans un climat de plus en plus tendu que le gouvernement a approuvé la prolongation pour 6 mois de l’état d’urgence. Le
Alors que le dernier rapport parlementaire sur l’état d’urgence a montré la portée limitée d’un régime qui se voulait d’exception, la France va donc s’installer de façon durable dans une situation qui marginalise chaque jour davantage le rôle du juge judiciaire, garant des libertés individuelles, au profit du seul pouvoir exécutif. Nous savons, aujourd’hui, que l’état d’urgence a été utilisé pour autre chose que la lutte contre les actes de terrorisme, notamment pour empêcher des manifestations et assigner à résidence des militants politiques sans que tout cela ait le moindre rapport avec la lutte contre les actes de terrorisme.