Droits de l'HommeGouvernance

Il y a 25 ans je débarquais à Kigali dans le cadre de la MINUAR II

Environ à cette date, il y a 25 ans je débarquais à Kigali dans le cadre de la Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda 2 (MINUAR II). En effet j’ai fait partie, après la fin du génocide, j’ai fait partie de la partie de fonctionnaires de l’ONU qui avaient été envoyés pour organiser l’arrivée des autres. Nous étions 4 chefs de sections et 2 de nos assistants.

Nous avons fait le trajet Nairobi-Kigali dans un C-130 militaire. A l’arrivée è l’aéroport ce sont des soldats du contingent militaire américain qui assurait les formalités administratives. Ce n’est qu’après que ce qui restait des autorités administratives rwandaises se manifestaient, par la présence d’un jeune qui prenait les noms de ceux qui entraient dans le pays.

La ville était réduite dans de telles conditions qu’on ne voyait dans les rues que les véhicules des ONG et de l’ONU. Même à pied, on ne voyait que des chiens repus. Rien ne fonctionnait: postes, banques, hôtels, restaurants, etc.

À notre arrivée au bureau, on nous a abandonnés dans la cour des bureaux. Pendant que nous étions là sans savoir quoi faire, le patron de l’administration, un tchadien, a ouvert une fenêtre de son bureau et nous lancé: « Ici c’est Kigali. Il faut savoir se débrouiller ». Comment savoir se débrouiller dans une ville qui avait vécu un génocide? Dans laquelle tout était à refaire?

Nous avons été obligés de dormir sur des matelas jetés par terre. Par manque d’eau, c’est de l’eau minérale fournie par le contingent militaire canadien que nous utilisons pour les toilettes. Pour manger, ce sont les rations militaires qu’on nous distribuait. La française était très appréciée.

Le lendemain, nous avons commencé à faire le tour des hôtels, qui étaient tous administrés par des contingents militaires. L’hotel Méridien était aux mains du contingent ghanéen. Presque toutes les fenêtres avaient été détruites. Naturellement, le restaurent ne fonctionnait pas.

Nous sommes allés à l’Hotel des Mille Collines. Là, c’était le management précédent qui le gérait. Ils nous ont dit que dans une semaine ou dix jours, ils allaient rouvrir.

En rentrant au bureau, nous avons découvert un endroit où une dame faisait à manger, moyennant paiement en dollars. Elle servait du riz avec une sauce viande, mais sans viande. C’était toujours mieux que les rations alimentaires militaires. Nous en sommes devenus des clients assidus.

Après quelques jours, un type s’est mis à vendre des brochettes au bord de la route. Mais très souvent les files d’attente étaient si longues qu’au moment de notre tour, il n’y avait plus rien.

Après une semaine, nous sommes retournés à l’Hotel des Mille Collines pour voir ce qu’il en était de leur promesses. Effectivement, ils pouvaient prendre de la clientèle si celle-ci n’était pas regardante.

En effet, il n’y avait ni électricité ni eau courante! Mais les lits étaient confortables, malgré tout. Nous avons immédiatement pris possession de nos chambres. Les prix fixés étaient au début $60, au bout de quelques jours, lorsqu’ils ont commencé à nous fournir de l’eau, ce prix a grimpé à $90, à la fourniture d’électricité et la reprise du service restaurant, il est monté à plus de $100 /nuit.

Après une semaine, nous sommes retournés à l’Hotel des Mille Collines pour voir ce qu’il en était de leur promesses. Effectivement, ils pouvaient prendre de la clientèle si celle-ci n’était pas regardante.

Avec toutes ces augmentation, le prix était sur le point de dépasser notre allocation journalière. Au bout de quelques temps, celle-ci ne nous suffisait plus. Il fallait régler la note. Seulement, l’hôtel n’acceptait pas les cartes de crédit et nous, nous n’avions plus d’argent comptant pour nous acquitter de la note. Il a fallu donc trouver une solution.


Heureusement, l’hôtel dépendait de la compagnie aérienne belge Sabena. Et celle-ci avait commencé à fonctionner à plein régime. Avec nos cartes de crédit, nous avons payé la note à la compagnie aérienne, qui à son tour a payé l’hôtel.

J’ai servi dans d’autres missions pour la paix. mais la plus difficile a été celle du Rwanda. Du point de vue de mes fonctions officielles, j’étais aussi chef de la section des services généraux. En plus de celles-ci, j’ai servi comme président d’une commission d’enquête interne qui devait faire des enquêtes dans tous les cas d’accidents, de vol ou de meurtre impliquant des membres de la première et de la deuxième mission. Ce qui m’a permis de visiter tout le pays, en 4X4 et en hélicoptère, et de voir l’ampleur des destructions.

La vue des destruction et les déchirures sociales que ce genocide avait causées, j’ai mis près de 20 ans pour vaincre les dégâts psychologiques que cette vue avait causés en moi. Chaque fois que j’évoquais cette expérience, je pleurais à chaudes larmes. Ce n’est qu’en 2012, lorsque j’ai fait un tour au Rwanda et que j’ai vu comment le pays s’était relevé que j’ai pu me reprendre.

Le Rwanda est un pays dont la densité au kilomètre carré est 10 fois supérieure à celle de la Guinée, sur un territoire plutôt pauvre. Mais les progrès qu’il a accomplis dépassent toute imagination. La capitale est parsemée de routes modernes et propres. Des feux de circulation

Les ONG de defense des droits humains dénoncent à juste titre les graves violations des droits humains commises par le régime de Paul Kagame ou ses manipulations des statistiques, mais on ne peut nier qu’il a réussi à pacifier le pays et à le mettre sur les rails.

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konakryexpress

Je revendique le titre de premier clandestin à entrer en Italie, le jour où la mort de Che Guevara a été annoncée. Mais comme ce serait long de tout décrire, je vous invite à lire cette interview accordée à un blogger et militant pour les droits humains qui retrace mon parcours dans la vie: https://fr.globalvoices.org/2013/05/20/146487/

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