Il y a 21 ans était révélé le testament de Yaguine Koita et Fodé Tounkara
Ce 29 juillet 2020 comme d’habitude probablement, il y aura peut-être des commémorations dans quelques endroits du monde en souvenir de Yaguine Koita et Fodé Tounkara, ces deux jeunes âgés d’à peine 14 et 15 ans, décédés le 29 juillet 1999. Mais malheureusement, ce ne sera pas en Guinée, la terre qui les a vus naitre.
A Rome, il y a deux ans le site abitarearoma.it rappelait, en italien, leur histoire et signalait l’installation du panneau en marbre portant leurs noms dans un jardin de la Piazza Galgano à côté de Cinecittà, à Rome:
Aujourd’hui, le 24 octobre 2017 vers 13 heures, j’ai accidentellement croisé deux travailleurs de la municipalité qui posaient une plaque de marbre dans le jardin de la Piazza Galgano à Lamaro-Cinecittà. Le paneau indique à qui, depuis de nombreuses années, l’espace vert dont notre journal a traité à plusieurs reprises, est intitulé: Yaguine Koita et Fodè Tounkara âgés de 14 et 15 ans …
Il y a dix ans, le comité de district de Lamaro-Piazza Cavalieri del Lavoro, présidé par Teresa Vergali, maintenant âgée de quatre-vingt-dix ans, relayeuse et combattante pendant la guerre de libération, a demandé de donner au jardin le nom de ces deux garçons africains. C’est en consultant par hasard le plan des rues que l’on s’est aperçu que l’attribution du nom avait été décidée. Seul le panneau portant leurs noms manquait. Aujourd’hui, il est arrivé, silencieux, sans cérémonies, avec seulement moi comme spectatrice occasionnelle qui aie assisté en silence, presque avec recueillement, au travail patient et minutieux des travailleurs municipaux. Il est arrivé sans qu’on explique qui étaient ces deux adolescents guinéens et pourquoi on donnait leurs noms au jardin autogéré par des bénévoles des bâtiments environnants, qui est devenu un centre de vie sociale intense.
Chaque année, des commémorations sont organisées en leur souvenir. Il y a 7 mois, en novembre 2019, le site romamultietnica.it signalait, toujours en italien:
Mercredi 20 novembre 2019, le Département des politiques de l’école, de la culture, des sports et de la jeunesse de la mairie VII, avec la collaboration de l’Institut global de via Giuseppe Messina, promeut une célébration à la mémoire des deux jeunes et vise à impliquer les jeunes générations, à partir des élèves des écoles locales, pour que leur histoire devienne un moment de réflexion et de discussion sur les thèmes de l’hospitalité et de l’intégration. À 8h30, projection du film Il sole dentro, de Paolo Bianchini (Italie, 2012)
Voici le lettre que les deux adolescents avaient adressée aux dirigeants européens pour expliquer pourquoi ils s’étaient lancés dans cette aventure qui allait emporter leurs jeunes vies:
Excellences, Messieurs les membres et responsables d’Europe,
Nous avons l’honorable plaisir et la grande confiance de vous écrire cette lettre pour vous parler de l’objectif de notre voyage et de la souffrance de nous, les enfants et jeunes d’Afrique.
Mais tout d’abord, nous vous présentons les salutations les plus délicieuses, adorables et respectées dans la vie. A cet effet, soyez notre appui et notre aide. Vous êtes pour nous, en Afrique, ceux à qui il faut demander au secours. Nous vous en supplions, pour l’amour de votre continent, pour le sentiment que vous avez envers votre peuple et surtout pour l’affinité et l’amour que vous avez pour vos enfants que vous aimez pour la vie. En plus, pour l’amour et la timidité de notre créateur Dieu le tout-puissant qui vous a donné toutes les bonnes expériences, richesses et pouvoirs de bien construire et bien organiser votre continent à devenir le plus beau et admirable parmi les autres.
Messieurs les membres et responsables d’Europe, c’est de votre solidarité et votre gentillesse que nous vous crions au secours en Afrique. Aidez-nous, nous souffrons énormément en Afrique, nous avons des problèmes et quelques manques au niveau des droits de l’enfant.
Au niveau des problèmes, nous avons la guerre, la maladie, le manque de nourriture, etc. Quant aux droits de l’enfant, c’est en Afrique, et surtout en Guinée nous avons trop d’écoles mais un grand manque d’éducation et d’enseignement. Sauf dans les écoles privées où l’on peut avoir une bonne éducation et un bon enseignement, mais il faut une forte somme d’argent. Or, nos parents sont pauvres et il leur faut nous nourrir. Ensuite, nous n’avons pas non plus d’écoles sportives où nous pourrions pratiquer le football, le basket ou le tennis.
C’est pourquoi, nous, les enfants et jeunes Africains, vous demandons de faire une grande organisation efficace pour l’Afrique pour nous permettre de progresser.
Donc, si vous voyez que nous nous sacrifions et exposons notre vie, c’est parce qu’on souffre trop en Afrique et qu’on a besoin de vous pour lutter contre la pauvreté et pour mettre fin à la guerre en Afrique. Néanmoins, nous voulons étudier, et nous vous demandons de nous aider à étudier pour être comme vous en Afrique.
Enfin, nous vous supplions de nous excuser très très fort d’oser vous écrire cette lettre en tant que Vous, les grands personnages à qui nous devons beaucoup de respect. Et n’oubliez pas que c’est à vous que nous devons nous plaindre de la faiblesse de notre force en Afrique.
(Signature) Ecrit par deux enfants guinéens Yaguine Koita et Fodé Tounkara.