La Gambie et le Togo s'opposent à la limitation des mandats présidentiels
Suite à la récente réunion des chefs d’états membres de la CEDEAO à Accra le 19 mai dernier, le journaliste et blogger gambien Dembah Kandeh a écrit un article pour notre réseau qui a été traduit par Maéva Rose sous le titre Limiter les mandats présidentiels dans l’ensemble des pays d’Afrique de l’Ouest? Pas si vite. Dans cet article Kandeh présente quelques commentaires de la blogosphère anglophone de la sous région à propos du refus des dictateurs du Togo et de la Gambie.
Traduction publiée le 28 Mai 2015 11:58 GMT
Les dirigeants d’Afrique de l’Ouest réunis à Accra, au Ghana, ont abandonné l’idée de limiter à deux le nombre de mandats présidentiels dans la région, en raison de l’opposition de la Gambie et du Togo, les seuls Etats membres sans limites de mandat. La constitution de la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest empêche les présidents d’exercer plus de deux mandats.
L’an passé, le président burkinabé Blaise Compaoré, qui dirigeait le pays depuis 27 ans, a été forcé de démissionner après avoir tenté de modifier la constitution pour se maintenir au pouvoir.
Le président de Gambie, Yahya Jammeh, a pris le pouvoir lors d’un coup d’Etat militaire en 1994 et a depuis été réélu à quatre reprises. Les observateurs nationaux et internationaux, y compris ceux de l’Union Africaine (UA) et du Secrétariat du Commonwealth, ont toujours décrit les élections comme “libres, régulières et pacifiques.” Cependant, au cours de la période qui a précédé les dernières élections présidentielles (en novembre 2011), la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a refusé d’envoyer des observateurs en Gambie en arguant que les élections ne seraient ni “libres”, ni “régulières.”
Quant au président Faure Gnassingbe, il a remporté les élections présidentielles togolaises en 2005 après le décès de son père, Gnassingbe Eyadema, qui avait pris le pouvoir lors d’un coup d’Etat en 1967. Le mois dernier, M. Gnassingbe, maintenant âgé de 48 ans, a été réélu sur fond de protestations de ses opposants, bien que l’UA et la CEDEAO aient parlé d’élections “libres et régulières.”
D’après Reuters, la ministre des Affaires étrangères ghanéenne, Hannah Tetteh, a déclaré que la proposition devait être débattue lors du sommet d’Accra mais que “les points de vue divergents (du Togo et de la Gambie) étaient devenus l’avis de la majorité à la fin de la journée”.
Des internautes des pays d’Afrique de l’Ouest ont exprimé leur colère sur les réseaux sociaux suite à l’abandon du projet de limitation des mandats présidentiels dans la région. Alors que certains restent optimistes, d’autres sont déçus et indignés, d’autant plus qu’ils ont le sentiment largement partagé que la région peine encore à adopter des contrepoids au pouvoir exécutif.
L’internaute gambien Sanna Camara n’a pas apprécié le résultat du sommet, se demandant comment 16 chefs d’Etat pouvaient prendre une décision aussi importante en passant outre les souhaits de millions d’habitants d’Afrique de l’Ouest:
Al Amin Jahateh lui rétorque avec cynisme:
Nshomwanmomtanla s’est montré surpris que les opinions divergentes de deux pays soient devenues l’”avis de la majorité.” Il écrit sur Facebook:
Alhagie Jobe exprime les mêmes préoccupations:
Ona Victor Obinna affiche un certain désespoir:
Thierno Ba lance un avertissement à la CEDEAO:
Hassan Matia se demande comment un pays comme la Gambie peut participer à un forum sur la démocratie:
Modou Joof a cru à une blague du bloc régional et cherche à savoir comment le point de vue de deux chefs d’Etat peut supplanter les intérêts de 13 nations:
En revanche, certains internautes, comme Adisa A. Alkebulan, affirment que les dirigeants devraient rester en fonction aussi longtemps que leur peuple le souhaite:
“Pourquoi les remplacer s’ils travaillent dur?” s’interroge Juneil Bryte:
Même si le débat sur la limitation des mandats présidentiels continue sur Internet, il n’aura probablement aucun effet sur la décision prise lors du sommet. Les citoyens de la Gambie et du Togo devront certainement compter sur d’autres moyens s’ils désirent poursuivre le changement démocratique.