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Le basketteur Ngagne Diop dit “Gangio” expulsé d’Italie, victime du “décret de sécurité”

J’ai écrit ce billet en italien et traduit en français pour globalvoices.org qui l’a publié le 5 juin 2019. Il traite de la mésaventure du jeune sénégalais NGagne Diop dit « Gangio » qui vivait au nord de l’Italie depuis quelques années et jouait au basket dans une équipe de sa ville d’accueil. A cause du changement dans la loi sur la résidence des étrangers, proposé par Matteo Salvini, ministre de l’intérieur, de la Lega, les juges ont rejeté sa demande de renouvellement de son permis de séjour deux fois.

Dans sa mésaventure, il a eu le soutien de nombreux italiens.

Ngagne Diop, appelé par tous “Gangio”, est l’une des premières victimes du renforcement de la chasse aux immigrants déclenchée par le ministre de l’Intérieur italien Matteo Salvini, avec le décret sur la sécurité (PDF du texte du décret approuvé en 2018, en italien). En outre, une mise à jour de la loi, appelée “décret sur la sécurité bis“, qui a déjà été critiquée de plusieurs côtés, en particulier de la part des organisations internationales, arrive également ces jours-ci.

Davide Drago a reconstruit l’histoire de Gangio sur sportallarovescia.it:

Ngagne Diop, surnommé Gangio par tout le monde, était arrivé à Valsusa il y a quelques années grâce à un vaste projet d’accueil de demandeurs d’asile, après avoir fait face, comme tant d’autres, au voyage du Sénégal au désert et à l’enfer de la Libye pour ensuite traverser la Méditerranée …

On pourrait penser que le jeune homme a décidé de quitter l’Italie comme tant de migrants, qui utilisent notre pays uniquement comme lieu de passage. Mais non, Gangio dans notre pays voulait y vivre et il s’y trouvait bien. Le garçon est victime de nos lois. La commission qui examine les demandes d’asile a rejeté sa demande à deux reprises et la semaine dernière, le juge n’a pas jugé valide la demande de suspension de la procédure d’expulsion, dans l’attente du pourvoi en cassation.

Toute l’équipe de Polisportiva Basket Avigliana est surprise par cette mesure qui frappe son pivot et exprime sa solidarité. Selon fanpage.it, son président explique:

“Jusqu’il y a 12 mois, il aurait eu toutes les conditions pour rester, mais la nouvelle réglementation a tout bouleversé “, accuse le président de la Polisportiva, rappelant:” Après quelques mois de formation professionnelle, il avait également trouvé un emploi dans une coopérative sociale locale au cours des dernières semaines. Tout cela n’a pas suffi avec les nouvelles lois sur l’accueil des migrants dans notre pays à lui garantir l’obtention d’un permis de séjour. La suppression du permis humanitaire par le décret sur la sécurité a brisé l’espoir d’une vie paisible et sûre de notre bon géant ami et coéquipier”.

Les Italiens ont utilisé les médias sociaux pour exprimer leur solidarité avec le jeune homme. À la suite d’un article sur valsusaoggi.it, un lecteur qui signe dario écrit ironiquement :

Quelqu’un sera fier d’avoir “sauvé” la nation en l’éloignant, lui, et d’autres comme lui …

Sur le même site Lele écrit aussi avec ironie :

Mais cela devrait être clair maintenant, ils nous l’expliquent de toutes les manières : si le problème de l’Italie s’aggrave, alors que d’autres nations européennes progressent, ce n’est pas à cause la bureaucratie, de la corruption, du crime plus ou moins organisé, mais de quelques milliers de migrants qui ne suffisent même pas à combler le déclin démographique de l’Italie, ce qui entraînera inévitablement l’effondrement du système national de “protection sociale”.

Ils ont également utilisé Facebook. Dans un commentaire sur ce média, Francesco, au nom du conseil d’administration de la Polisportiva Avigliana Basket, écrit :

Nous ne savons pas si sans Gangio nous serons plus en sécurité en Italie ou si quelqu’un vivra mieux sans lui. Nous savons sûrement qu’il nous manquera beaucoup et nous espérons pouvoir le serrer dans nos bras bientôt et le ramener sur le terrain de jeu avec nous.

Ce billet a suscité plus de 6.700 réactions, dont 679 commentaires et 3.700 partages. Le commentant, Marcello D’Alessio écrit:

Je suis de Caselle, de l’entreprise Filmar … nous jouerons mercredi … Je suis le responsable du reportage sur le terrain … Je vais écrire son nom sur la liste des joueurs et en lettres majuscules … c’est une histoire effrayante mais malheureusement fille de ces temps horribles et inhumains … je suis proche de vous

Parmi ceux qui ont partagé le post du président de Polisportiva Avigliana Basket, figure également Overtime – Storie a spicchi, suscitant plus de 4 000 interactions avec 370 commentaires et 887 partages.

Cependant, tout le monde n’a pas sympathisé avec Gangio.Luka Miharija, par exemple, explique pourquoi il vote pour la Ligue :

Je suis né étranger et je sais ce que signifie gagner chaque chose. C’est pourquoi je suis fier de voter pour la Lega et Matteo Salvini, parce que c’est l’Italie que j’aime et l’Italie que je veux, là où on récompense ceux qui le méritent. Et ceux qui ne veulent pas faire quoi que se soit et qui n’ont pas le minimum requis doivent partir. Et pas celle de la gauche qui a permis pendant des années à n’importe qui d’entrer et de recevoir de l’argent et de vivre sur notre dos … Cela dit, revenons à parler de basket-ball ce qui est peut-être mieux et crée moins de problèmes.

Le commentaire de Luka Miharija a suscité plusieurs commentaires, dont celui de Tobia Mattioli, qui a déclaré :

Luka Miharija, si Salvini avait été là, ton père ne serait pas arrivé [jusqu’ici]. Si Salvini avait été là, tu ne serais probablement pas né.

Pasquale Pagliuca précise :

Luka Miharija, peut-être as-tu seulement oublié que la Ligue dirige ce pays depuis 20 ans et que la loi qui régit l’immigration depuis 2002 est celle, comme tu le sais, la loi Bossi Fini. Ensuite, tu peux décider d’ignorer la réalité et de continuer à dire des conneries

Marco Campaniolo aussi a réagi en écrivant :

Luka Miharija, mais pourquoi faut-il une guerre permanente contre ceux qui sont le plus mal lotis ? Si à ta famille on a nié ses droits, pourquoi est-il juste de les refuser à d’autres aussi ?Je me rends compte que pour cette raison même, tu peux “te ronger les ongles” et penser que cette inégalité de traitement n’est pas juste. Mais ce n’est pas pour cela que ça doive être transformé en une course vers le bas. De plus, parce que, comme tu l’as dit toi-même, si ton père, malgré ses efforts, ne parvenait pas à trouver un emploi, il aurait été forcé de rentrer chez lui et de mener une guerre qu’il (si j’ai bien compris) ne sentait pas comme sienne.Cela aurait-il été juste ?

Selon ce qu’écrit Internazionale.it, 130.000 demandes de protection internationale ont été présentées en Italie en 2017, 52% de ces demandes ont été rejetées, 25% ont bénéficié d’une protection humanitaire, 8% du statut de réfugié pour protection subsidiaire supplémentaire et 7% d’autres types de protection.

En novembre 2018, à l’initiative du ministre Matteo Salvini, de la Ligue, le Parlement italien a approuvé le “décret sur la sécurité” qui limite la possibilité d’accueillir des étrangers et introduit une série de nouvelles règles qui affectent les “sans papiers”.


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konakryexpress

Je revendique le titre de premier clandestin à entrer en Italie, le jour où la mort de Che Guevara a été annoncée. Mais comme ce serait long de tout décrire, je vous invite à lire cette interview accordée à un blogger et militant pour les droits humains qui retrace mon parcours dans la vie: https://fr.globalvoices.org/2013/05/20/146487/

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