Le Mozambique criminalise le mariage des enfants
Le mariage précoce est un problème partout en Afrique. En théorie, en Guinée l’âge minimal au mariage est de 17 ans pour les femmes et de 18 ans pour les hommes (article 280 du Code Civil). Malheureusement, il n’y a aucune provision pour punir ceux qui enfreindraient à ces limites légales. En effet si l’un des deux futurs époux n’a pas atteint la majorité légale, soit 21 ans, l’autorisation de ses parents ou de son tuteur est nécessaire. Hors, il il n’est pas rare que des jeunes-filles se marient avant 17 ans.
L’avantage de cette loi du Mozambique est de prévoir des punitions pour ceux qui enfreindraient cette loi.
Le 18 juillet, l’Assemblée nationale de la République du Mozambique a adopté une loi criminalisant le mariage entre un adulte et une personne de moins de dix-huit ans.
La nouvelle loi stipule qu’un adulte qui épouse un enfant ou un adolescent sera puni d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à douze ans et qu’un membre de la famille qui oblige l’enfant à accepter le mariage encourt une peine pouvant aller jusqu’à huit ans.
Avec l’approbation de la loi, les membres des organisations de la société civile, qui réclamait une telle loi pendant depuis des années, ont échangé des accolades et des sourires.
Le taux de mariages précoces du Mozambique est l’un des plus élevés au monde. Une étude réalisée par le Southern Africa Network against Child Trafficking [Réseau d’Afrique australe contre la traite des enfants, NdT] classe le Mozambique au onzième rang mondial pour le taux d’unions précoces et au second rang parmi les pays d’Afrique australe.
Les statistiques officielles indiquent qu’environ 500 000 femmes mozambicaines âgées de vingt à vingt-quatre ans se sont mariées avant l’âge de dix-huit ans et environ 57 000 avant l’âge de quinze ans.
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Selon plusieurs études, le mariage prématuré est un facteur décisif de l’arrêt de la scolarisation des filles. Cela les expose également à des maladies sexuellement transmissibles telles que le SIDA ou la fistule obstétricale, qui contribue à la mortalité maternelle et infantile.
Kino Fernando Caetano, président du Parlement des enfants, une organisation civique travaillant avec des enfants et des adolescents du Mozambique, a déclaré:
La loi récemment adoptée est une victoire pour les enfants et la société mozambicaine en général. La loi est le résultat d’un véritable effort impliquant le gouvernement du Mozambique (MGCAS), l’Assemblée de la République et la société civile (CECAP).
Les difficultés après l’approbation de la loi
S’adressant à Global Voices, Dércio Chiemo, enseignant local et militant social, a souligné que si la loi est une victoire pour tous les acteurs œuvrant à l’éradication des mariages précoces, les communautés qui continuent cette pratique auront besoin de soutien :
C’est une victoire pour les organisations qui se sont unies et qui se sont battues pour que cette loi soit adoptée. C’est aussi une grande victoire pour toutes ces voix et ces cris ignorés des jeunes filles qui ont été forcées de se marier prématurément, sans leur consentement, sans avoir été écoutées […] [Mais] Nous ne pouvons pas penser que [seulement] parce que cette loi existe, les mariages prématurés prendront fin, cela montre qu’à partir d’aujourd’hui nous devrons commencer à travailler pour que les gens connaissent la loi et contribuent ainsi à réduire ou même à faire cesser les mariages précoces.
Pour Júlio Mutisse, licencié en droit de l’Université Eduardo Mondlane, le problème des mariages précoces va au-delà de la simple question juridique, car il est nécessaire de comprendre le phénomène dans son ensemble :
Le défi est grand. Cela va au-delà de l’approbation de la loi. Comme nous le savons, notre pays a beaucoup de bonnes lois prévoyant des mesures sérieuses concernant certains comportements, mais nous continuons être témoins de leur violation à maintes reprises.
C’est un pas dans la bonne direction, mais nous devons comprendre le phénomène et nous attaquer à ses causes. Pourquoi le mariage a-t-il été réglementé comme avant ? Comment était la société ? Ce phénomène est-il nouveau ? Nous devons travailler sur les causes et avec une grande acuité.
Alors que Fernando Moiane déclarait que le principal problème résidait dans les coutumes et les habitudes culturelles des Mozambicains :
Oui, nous devons lutter contre les mariages précoces, mais je pense que le Parlement a fait peu et que cette loi ne soutient en rien la culture, les us et coutumes des Mozambicains. Pour moi, cette loi est vouée à l’échec car elle ne reflète pas l’ensemble des us et coutumes séculaires des peuples africains en général et mozambicain en particulier.
PS : Préparez les chaînes pour arrêter tous les hommes de Chibuto, Homuine, Mutarara, Macomia, etc.
Ce billet écrit par Bendito Zivane en portugais a été traduit en anglais par Dércio Tsandzana et publié sur globalvoices.org. je l’ai ensuite traduit en français. Ma traduction a été publiée le 12 aout 2019 sur le même réseau.