Un moment crucial pour les droits humains en Guinée
Ce billet a été écrit par Jim Wormington, @jwormington, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Human Rights Watch (HRW). Il a été publié le 19 juillet sur le site de cette ONG, en prévision de l’Examen Périodique Universel (EPU) de la Guinée, un mécanisme unique du Conseil des droits de l’homme ayant pour but d’améliorer la situation des droits de l’homme dans chacun des 193 États membres des Nations Unies, HRW a présenté son rapport sur la situation des droits humains dans le pays. En voici le résumé.
L’an prochain, le bilan de la Guinée en matière de droits humains fera l’objet d’un examen approfondi devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Human Rights Watch a transmis hier au Conseil un rapport décrivant la situation des droits humains dans le pays et les domaines dans lesquels des progrès sont encore nécessaires.
L’Examen périodique universel (EPU) de la Guinée survient à un moment crucial. Depuis l’arrivée au pouvoir du président Alpha Condé en 2010 – qui a mis fin à cinq décennies de régime autoritaire – la Guinée a accompli des progrès significatifs en termes de renforcement de l’État de droit, en particulier en améliorant la supervision des forces de sécurité et en limitant le rôle de l’armée dans la mise en application des lois.
Mais maintenant, avec une élection présidentielle prévue vers la fin de l’année 2020, une crise des droits humains pourrait réapparaitre. Depuis juillet 2018, le gouvernement a interdit pratiquement toutes les manifestations, mais les partisans de l’opposition sont susceptibles de descendre dans les rues si Condé tente de faire amender la constitution afin de pouvoir briguer un troisième mandat.
Les manifestations politiques en Guinée sont souvent violentes. De nombreux manifestants, ainsi que plusieurs membres des forces de sécurité, ont été tués au cours de la dernière décennie, et Human Rights Watch a documenté des dizaines de meurtres par balles qui auraient été commis par la police et la gendarmerie.
Le gouvernement d’Alpha Condé a fait trop peu d’efforts pour décourager les violences d’État en menant des enquêtes sur les meurtres illégaux présumés et en poursuivant leurs auteurs en justice. Il est parvenu au pouvoir en 2010, mais la première condamnation d’un membre des forces de sécurité pour avoir abattu un manifestant n’a eu lieu qu’en février 2019.
Dans son rapport en vue de l’EPU de la Guinée, Human Rights Watch réitère sa recommandation, faite initialement en avril, que le gouvernement remette en fonctions une unité judiciaire spéciale afin que les décès survenant lors de manifestations fassent l’objet d’enquêtes plus efficaces.
L’EPU de la Guinée est une occasion cruciale pour que les États membres de l’ONU pressent le gouvernement de faire des progrès sur les questions relatives aux droits humains, en particulier à l’approche de l’élection de 2020. Ils devraient, en priorité, exhorter le gouvernement à faire en sorte que les forces de sécurité n’aient recours à la force que lorsque c’est absolument nécessaire, à s’occuper du vieux problème de l’impunité pour les violences d’État et à respecter la liberté de réunion.