Les Ennemis d’Internet 2010
Parmi les pays où sévissent des Ennemis d’Internet 2010, il y a deux autres membres de l’Union africaine: la Tunisie et l’Egypte. Si l’Erythrée où la presse « à force d’etre baillonnée est simplement inexistante » et qui occupe pour la troisième consécutive la place du pays le plus répressif des droits d’expression du monde, ne figure que parmi les pays sous surveillance, c’est probablement par manque de moyens de sévir plus.
Voici l’analyse de Lucie Morillon, Responsable du Bureau Nouveaux Médias et de Jean-François Julliard Secrétaire général de Reporters sans fronières.
La liste des ennemis d’Internet établie par Reporters sans frontières réunit, cette année encore, les pires violateurs de la liberté d’expression sur le Net : l’Arabie saoudite, la Birmanie, la Chine, la Corée du Nord, Cuba, l’Egypte, l’Iran, l’Ouzbékistan, la Syrie, la Tunisie, le Turkménistan, le Viêt-nam.
Parmi ces pays, certains décident d’empêcher à tout prix leurs citoyens d’avoir accès à Internet : la Birmanie, la Coree du Nord, Cuba et le Turkmenistan. Autant de pays où les obstacles techniques et financiers sont conjugués avec un contrôle d’Etat et l’existence d’un intranet très limité. Coupure d’Internet ou ralentissement majeur sont monnaie courante en périodes de troubles. L’Arabie saoudite et l’Ouzbékistan optent pour un filtrage massif et incitent leurs internautes à l’autocensure. La Chine, l’Egypte, la Tunisie et le Viet-nâm misent sur une stratégie de développement des infrastructures à des fins économiques mais contrôlent de près le contenu politique et social (les systèmes de filtrage chinois et tunisiens sont de plus en plus sophistiqués) et montrent une profonde intolérance vis-à-vis des voix critiques. La grave crise interne qui traverse l’Iran depuis des mois a pris dans ses filets les net-citoyens et les nouveaux médias, devenus, à leur tour, des ennemis du régime.
Parmi les pays “sous surveillance”, plusieurs démocraties. L’Australie, en raison de l’implantation prochaine d’un système poussé de filtrage du Net et la Corée du Sud où des lois trop sévères encadrent les internautes, en remettant en cause leur anonymat et en incitant à l’autocensure.
La Turquie et la Russie font leur entrée dans cette liste des “pays sous surveillance”. En Russie, suite au contrôle exercé par le Kremlin sur la majorité des médias, Internet est devenu l’espace d’échange d’informations le plus libre. Mais son indépendance est menacée par des arrestations et poursuites de blogueurs, ainsi que des blocages de sites “extrémistes” qui ne le sont pas toujours. La propagande du régime est de plus en plus présente sur la Toile. Il existe un vrai risque qu’Internet ne se transforme en outil de contrôle politique.
En Turquie, les sujet tabous tournent principalement autour d’Atatürk, de l’armée, de la question des minorités (kurde et arménienne notamment) et de la dignité de la Nation. A ce titre, plusieurs milliers de sites sont bloqués, dont YouTube, suscitant des protestations. Les blogueurs et internautes qui s’expriment librement sur ces sujets s’exposent à des représailles, notamment judiciaires.
D’autres pays, dont les Emirats arabes unis, le Bélarus et la Thaïlande, restent dans la liste des “pays sous surveillance”, mais devront réaliser des progrès pour ne pas basculer dans celle des “Ennemis d’Internet”. La Thaïlande, en raison des abus liés au crime de lèse-majesté, les Emirats à cause du renforcement du filtrage. Et le président bélarusse vient de signer un décret liberticide qui régule le Net, et qui entrera en vigueur à l’été, quelques mois avant les élections.
Source: http://www.rsf.org/ennemis,36696.html