Guinée: Depuis 3 ans des viols politiques restent impunis
Le 28 septembre 2012, date anniversaire des violences sciemment organisées par le pouvoir aux mains des militaires à Conakry, Zainab Bangura, la première dame à avoir occupé le poste de ministre des affaires étrangères de la Sierra-Leone, en sa qualité de Représentante Spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles en conflit, a fait une importante mise au point sur l’impunité dont jouissent les responsables de crimes contre l’humanité et, en particulier sexuels, sous le gouvernement du Prof. de droit Alpha Condé. C’est frustrant et douloureux pour les victimes et leurs familles de voir des individus qui devraient recherchés par la justice internationale occuper des postes de responsabilité les narguer ainsi chaque jour leur en exhibant leur puissance à toutes les occasions.
Voici le texte de son message:
Il y a trois ans de cela, les atrocités commises contre des manifestants pacifiques par les forces de sécurité en Guinée-Conakry ont choqué le monde. Les femmes étaient des cibles particulières de la violence. Les viols publics et collectifs de femmes en plein jour ont dramatiquement montré que les violences sexuelles ne sont pas seulement une arme en temps de guerre. Servant en tant que tactique de conflit ou faisant partie du répertoire de la répression politique, l’objectif est le même : humilier, faire taire, intimider et punir les victimes.
La Commission internationale d’enquête sur les événements du 28 septembre 2009 en Guinée avait confirmé que, en plus du massacre d’au moins 150 manifestants non armés, au minimum 109 femmes ont été victimes de viol et d’autres formes d’abus sexuel. Selon la Commission internationale d’enquête, ces attaques généralisées et systématiques pourraient constituer des crimes contre l’humanité.
Je me félicite de l’inculpation, annoncée au début de ce mois, du colonel Abdoulaye Chérif Diaby, ancien ministre de la Santé du gouvernement Moussa Dadis Camara, pour sa responsabilité présumée dans les événements du 28 septembre 2009. Il est important que ces accusations, ainsi que d’autres, soient traitées rapidement et de manière approfondie, surtout étant donné que la justice en Guinée a déjà été retardée pendant trop longtemps. Bien que le lieutenant-colonel Moussa Tiégboro Camara a été inculpé au début de cette année pour son rôle présumé dans le massacre, à ce jour pas un seul auteur a été reconnu coupable.
En novembre 2011, mon prédécesseur s’est rendu en Guinée pour rencontrer des victimes de viol, des représentants des associations de victimes et des responsables gouvernementaux. Un Communiqué conjoint avait été convenu entre le gouvernement de la Guinée et de l’Organisation des Nations Unies, en indiquant clairement l’engagement du gouvernement à lutter contre l’impunité et, finalement, de prévenir et de décourager les violences sexuelles. Le Communiqué conjoint a également salué l’aide de l’Équipe d’experts sur l’Etat de droit / violences sexuelles dans les conflits pour apporter un appui au Panel de juges en Guinée, créé pour mener des enquêtes nationales et initier des poursuites sur les incidents de 2009. L’Équipe d’experts est actuellement engagé dans des discussions avec les autorités nationales afin de déployer un expert sur les violences sexuelles, et je tiens à encourager le gouvernement de Guinée à faciliter ce déploiement le plus tôt possible.
Il y a un besoin urgent d’aider les survivants et de traduire les coupables en justice. Il est également crucial que toutes les victimes, d’autres témoins et leurs familles bénéficient d’une protection complète et qu’aucun effort ne soit épargné pour assurer leur sécurité tout au long de ce processus. Des agresseurs connus ne doivent pas être autorisés à détenir des positions d’autorité.
S’attaquer à ces atrocités est indispensable pour favoriser la réconciliation, la confiance dans le système de justice et une paix durable. Nous nous sommes engagés à soutenir les efforts du gouvernement pour lutter contre l’impunité pour les violences sexuelles et à faire en sorte que de telles atrocités ne se répètent jamais. Nous continuerons de surveiller la situation en Guinée-Conakry et ailleurs où puissent se produire les violences sexuelles.