En Guinée, plus d’une fillette sur cinq se marie avant l’âge de 15 ans
Dans de nombreux pays du continent africain, des millions d’adolescentes enceintes et mariées se voient refuser l’accès à l’éducation à cause de politiques et de pratiques discriminatoires, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui, à l’occasion de la Journée de l’enfant africain. Plus de 49 millions de filles sont privées de l’enseignement primaire et secondaire en Afrique subsaharienne, dont 31 millions pour le secondaire, ce qui porte atteinte à leurs droits et restreint leurs opportunités.
Le mariage précoce et la grossesse des adolescentes font partie des causes principales de ce problème. En Afrique subsaharienne, 40 % des filles se marient avant leurs 18 ans. Parmi les 20 pays du monde ayant le plus fort taux de mariage des enfants, 15 se trouvent sur le continent africain. La région est aussi celle où on compte le plus de grossesses à l’adolescence. Dans 14 pays subsahariens, on dénombre entre 30 et 51 % des filles qui enfantent avant d’atteindre 18 ans. Des croyances culturelles ou religieuses stigmatisent souvent les filles célibataires enceintes, ce qui fait que beaucoup de filles enceintes sont forcées de se marier précocement.
« Le continent africain affiche l’un des taux de grossesse adolescente les plus élevés du monde, pourtant de nombreux gouvernements persistent à traiter ce problème de société et de santé publique en punissant les filles et en compromettant leur avenir », a déclaré Elin Martínez, chercheuse auprès de la division Droits des enfants de Human Rights Watch. « Les gouvernements devraient au contraire tout faire pour aider les filles à éviter les grossesses non désirées et encourager leurs efforts pour continuer à étudier. »…
De nombreuses filles adolescentes tombent enceintes car elles n’ont pas reçu les informations qu’il leur fallait pour prendre des décisions avisées relevant de leur sexualité, du planning familial ou de leur santé reproductrice. D’autres ont été forcées d’avoir des relations sexuelles et ont besoin de protection, de services médicaux et d’assistance. D’après les Nations Unies, 80 % de toutes les femmes du monde âgées de 15 à 24 ans qui sont porteuses du VIH vivent en Afrique subsaharienne. Sur l’ensemble du continent, les filles de 15 à 19 ans ont cinq fois plus de chances que les garçons d’être infectées par le VIH.
Souvent l’éducation sexuelle et reproductive ne figure pas dans les programmes scolaires nationaux. Pour les quelques pays où elle y figure, dans des programmes ou des thèmes de sensibilisation au VIH ou de « compétences de vie », les enseignants sont souvent réticents à aborder ces sujets, soit à cause du contenu sexuel et reproductif, soit à cause de contraintes de temps et de ressources d’enseignement.
Tous les gouvernements d’Afrique se sont engagés à atteindre les Objectifs de développement durable de l’ONU en termes d’ égalité des genres et d’ accès gratuit à l’enseignement primaire et secondaire pour tous les enfants d’ici 2030. L’Union africaine a d’ailleurs reconnu à quel point il était important de mettre fin au mariage des enfants, en constatant que c’était un obstacle majeur de développement et de prospérité dans la région, ainsi que d’éliminer toutes les formes de violence et de discrimination fondée sur le genre.
Les gouvernements d’Afrique devraient garantir aux filles le même accès que les garçons à un enseignement primaire et secondaire gratuit et de qualité, mais aussi un soutien pour continuer à étudier, a déclaré Human Rights Watch. Les gouvernements doivent faire marche arrière en ce qui concerne les politiques et pratiques dangereuses qui stigmatisent les filles, notamment les tests de grossesse forcés et les règlements qui autorisent à expulser les filles enceintes ou mariées. Les gouvernements devraient aussi adopter des lois qui fixent sans ambiguïté l’âge minimum du mariage à 18 ans aussi bien pour les garçons que pour les filles.
Il faut également qu’ils adoptent des directives claires ordonnant aux établissements de réadmettre les jeunes mères, qu’ils leur proposent une assistance et qu’ils veillent à ce qu’elles aient accès à des services pour la petite enfance. Enfin les gouvernements doivent veiller à ce que tous les enfants bénéficient d’une éducation sexuelle et reproductive complète et adaptée à leur âge. Dans la mesure du possible, ces enseignements scolaires devraient coopérer avec des centres d’éducation à la santé orientés vers la jeunesse afin que les adolescents reçoivent des informations impartiales et sans jugement de valeur.
« Ce sont avant tout les gouvernements qui ont la responsabilité de veiller à ce que les filles aient librement accès à l’enseignement primaire et secondaire, sans être stigmatisées ou discriminées », a conclu Elin Martínez. « Tous les gouvernements doivent bannir les politiques excluant les filles enceintes ou mariées et mettre en place des mesures qui garantissent que toutes les adolescentes puissent étudier. »
Extrait de Afrique : Permettre à toutes les filles d’accéder à l’éducation