Les raisons de ma dissociation du #blogcamp d'#ablogui du 23 mai 2015
Avec une trentaine de blogueurs guinéens, nous avons formé l’Association des blogueurs de Guinée (#ablogui). Par l’intermédiaire d’un des membres, nous avons obtenu un financement pour organiser un #blogcamp dans le 23 mai 2015. Lorsque j’ai vu les propositions de personnes à inviter, j’ai découvert qu’il y avait des ministres, aucune personne des organisations de la société civile. Lorsque j’ai suggéré d’en inviter, j’ai essuyé un refus sec à l’unanimité. Incapacité de ma part de me faire comprendre ou une appréciation différente des réalités actuelles de Conakry?
Pour justifier ma suggestion, voici le message que j’ai publié sur la page FB du groupe, avec peu de modifications:
Certains d’entre vous, soit sur cette page Facebook que dans des messages personnels, ont demandé des explications sur les raisons qui me poussent à me mettre de côté. Fodé a meme eu une expression qui a failli me mettre en crise « Abandon d’enfant ». Mais ma révolte contre l’invitation faite à des ministres va au-delà de ce que je peux supporter.
En effet, ce serait aller contre mes principes que de participer à un #blogcamp où parmi les invités il y a des ministres d’un gouvernement qui ne s’est pas illustré jusqu’à présent par les actions positives à son actif en matière de gouvernance ou de performances économique. Ils sont tous responsables du fait que le calendrier électoral n’est pas respecté, Ebola a franchi nos frontières, les jeunes sont sans travail, la société destructurée, aucun des OMD ne sera atteint, des employés de nos ambassades ne sont pas payés régulièrement, les guinéens qui sont à l’extérieur ne peuvent même pas renouveler leurs passeports, etc.
A mon avis, nous devrions plutôt dénoncer le fait que pour n’importe quel évènement des membres du gouvernement doivent participer. Un ministre devrait avoir d’autres priorités que d’assister à une rencontre de blogueurs. Quant à nous, blogueurs, notre rôle est de voir ce que le citoyen lambda ne voit pas et de le dénoncer. Nous ne trouvons pas de temps pour inviter nos partenaires naturels qui sont les organisations de la société civile, mais nous trouvons tant de temps pour ces gens qui sont en partie à la base des problèmes de notre société.
Il y a des blogueurs qui ont besoin de connaitre les règles élémentaires de l’écriture d’un blog. Celles des: QQOQCCP (Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Combien ? Pourquoi ?) et surtout l’éthique la plus élémentaire. On va vers des élections déjà très contestées, il faut que les blogueurs soient préparés à y participer activement. On a donc besoin de gens qui puissent nous fournir un minimum de formation en matière de la prévention des conflits et en technique de reportage pour combler ces lacunes dans ces domaines.
Tout en proclamant le caractère apolitique de l’association, l’invitation aux membres du gouvernement a été maintenue avec l’explication que cela n’avait aucune influence sur les opinions politiques des blogueurs quant aux contenus de leur blog car chacun avait sa liberté d’expression et d’engagement dans son blog.
En conclusion, les autres membres dont la majorité vit en Guinée, ont soutenu l’idée d’inviter les ministres au #blogcamp. Ainsi des ministres et des directeurs généraux sont invités, à cause de leurs fonctions, me dit-on. Il y a aussi un député de l’opposition, invité parce qu’il serait actif sur les réseaux sociaux. Toutefois, j’ai remarqué que son dernier commentaire sur Facebook date de février 2015 et l’avant dernier du mois d’octobre. Cependant, il semble plus actif sur Twitter, avec 1394 abonnés et 375 twist envoyés depuis 2012.
J’ai pensé que ma position était viciée par le fait de vivre dans un milieu éloigné des réalités sur place et surtout d’avoir traduit des centaines de billets traitant des violences allant jusqu’à la mort, que des pouvoirs dictatoriaux réservent aux blogueurs à travers le monde. Mes derniers billets traduits traitent des blogueurs de Zone9 d’Éthiopie, emprisonnés sous de fausses accusations par un régime totalitaire simplement pour s’être exprimé sur la gouvernance et les droits humains dans leur pays. Le blogueur et journaliste Eskinder Nega a été condamné à 18 ans de prison en 2012.
En Arabie Saoudite, le blogueur Raif Badawi a été condamné à 10 ans de prison et 1000 et à une amende d’environ 266 600 dollars US., à cause de ses écrits qui ne sont pas du goût de la monarchie archaïque qui gouverne ce pays.
J’ai essayé donc d’avoir les points de vue d’amis blogueurs vivant dans des pays africains. J’ai envoyé le texte en italique ci-dessus à des blogueurs d’Afrique de l’ouest et d’Afrique centrale, tous ont été surpris que des blogueurs invitent des ministres pour une rencontre qui devait être entre eux.
Il ne suffit pas d’ouvrir un blog ou de fréquenter régulièrement Internet pour être un blogueur jouant un rôle positif dans la société, en particulier dans un pays comme la Guinée, à mon avis. Pour pouvoir éviter les compromissions avec tous les pouvoirs politiques aussi bien gouvernementaux que de l’opposition, il ne doit laisser aucune possibilité à une interprétation partisane de son action. Cependant, cela ne veut pas dire qu’il doit être neutre et indépendant. Au contraire, différemment du journaliste, il doit exprimer ses points de vue personnels, en privilégiant le « JE » par rapport au « NOUS » et ses critiques, que ce soit en politique que dans le reste de sa communauté et de son environnement.
Une infiltration de cette organisation par le gouvernement ne m’étonnerait guère…
Alimou Sow est quasiment le seul blogueur guinéen à s’être démarqué dommage que ses fonctions professionnelles actuelles l’imposent une certaine neutralité pour ne pas dire autocensure….
Quand aux autres bon bahhh. Je les connais même pas en tout cas pas de leurs papiers.
Bappa Abdoulaye Bah votre décision est objective et rationnelle, c’est incohérent de leur part et ceci leur retire toute crédibilité.
Les autres aussi sont animés de bonnes intentions, mais je crois que dans ce cas, ils n’ont pas compris qu’il est plus facile de susciter le doute que de lutter contre le doute. En plus, comment peut-on condamner la participation de ministres à des mamayas et trouver normal qu’il participent à une réunion d’un groupe de blogueur.
C traumatisant, on fait tout à l’envers en Guinée !!! Je ne sais pas comment on va s’en sortir avec autant de légèreté dans les principes et les valeurs dans tous les domaines, y compris celui ci dont la liberté est fondamentale.
En plus, le plus inquiétant, c’est que la jeunesse qui constitue l’espoir pour l’avenir rentre aussi dans ce cercle vicieux.
Que le Tout Puissant nous aide !
Merci pour cette analyse qui décrit parfaitement la réalité. Une succession de dirigeants démagogues incapables, menteurs et semeurs de haine ethnique ne pouvait générer quine jeunesse à son image.