Camp BoiroDroits de l'HommeSékou Touré

Dans la nuit du 17 au 18/10/1971, la Guinée perdait la fine fleur de ses cadres et entrepreneurs

Contrairement à ce que croient beaucoup de jeunes, qui n'ont pas connu cette période tragique de notre pays, même si le tyran n'a déclaré la guerre qu'aux Peuls, la dictature de Sékou Touré n'a pas concerné qu'une ethnie ou une région. Elle a sévi sur toute l'étendue du territoire national dans toutes les ethnies et dans toutes les couches de la population.

Révisé le 18 octobre 2020

Funeste nuit que celle du 17 au 18 octobre 1971! On trouvera au fonds de ce billet les noms de quelques unes des victimes. Contrairement à ce que beaucoup de jeunes, qui n’ont pas connu cette période tragique de notre pays, la dictature de Sékou Touré n’a pas concerné qu’une ethnie ou une région. Elle a sévi sur toute l’étendue du territoire nationale dans toutes les ethnies et dans toutes les couches de la population.

Pour preuve, dans la liste partielle qu’on peut consulter au fonds de cette page, il y a 7 hauts cadres qui portent le nom Camara et 9 Diallo.

C’est cette nuit qui a vu mon père disparaitre dans des conditions effroyables à Kindia. Il avait l’ambition de contribuer à sortir la Guinée de sa pauvreté par la création d’unités industrielles qui puissent répondre aux besoins de la population, tout en donnant une impulsion à la production agricole

En effet quelques semaines avant sa deuxième arrestation et sa disparition définitive, il adressait une lettre le 8 mars 1971, au Secrétaire d’état chargé de l’industrie et des Mines, pour solliciter l’autorisation de réaliser 5 unités industrielles, notamment: 1 fabrique de couscous précuit à partir du maïs, 1 fabrique de pâte d’arachides et d’emballage, 1 fabrique de jambon, saucisson, 1 fabrique de produits ménagers d’entretien et 1 fabrique de confiture de bananes et de figues.

Voici le témoignage, paru en février dernier sur ce blog, de sa nièce Oumou Hawa Bah, cadre à Ernst & Young Guinée:

C’est après la mort du tyran Sékou Touré que nous avons appris par son meilleur ami avec lequel il était dans la même cellule, Mr Kaba Mory Lamine que mon Oncle a été torturé pendant les mois qui ont suivi son arrestation et fusillé le 18 Octobre 1971. Il nous a raconté ce qui s’est passé ce jour fatidique. Ils étaient dans la même cellule et que parmi ces personnes il n’y avait que des docteurs, des ingénieurs, des professeurs et des entrepreneurs. Qu’on ne soit donc pas étonné que la Guinée soit dans cette situation de misère et de sous-développement que nous connaissons aujourd’hui. Si dans la seule  cellule où se trouvait mon Oncle, il n’y avait que des Cadres émérites et des entrepreneurs. Je ne connais pas le nombre de cellules qu’il y avait au total dans le pays mais chacun peut imaginer l’étendue de la catastrophe et le  gâchis de Sékou Touré et de sa révolution.

Une publication d’Alpha M Diallo nous rappelle ce que fut cette horrible nuit du 17 au 18 octobre 1971 dans toute la Guinée:

Selon les témoignages des rescapés des camps de détentions politiques, dans la nuit du 17 au 18 octobre 1971, soixante-dix (70) détenus ont été extraits de leurs différentes cellules, déshabillés, ligotés et entassés dans des camions, direction l’échafaud.

Cette nuit inoubliable d’octobre 1971, soixante-dix Guinéens qui avaient combattu pour l’indépendance de leur pays, ont été fusillés sur ordre de Sékou Touré.

Presque tous étaient des hauts cadres de l’état, ministres, ambassadeurs, gouverneurs, magistrats, ingénieurs, médecins, professeurs, entrepreneurs, cultivateurs

Mais pourquoi cette date du 18 octobre 1971 ? Parce qu’il s’agissait de sacrifices rituels prescrits par les voyants occultes du régime d’alors pour obtenir la chute du Président ivoirien Houphouët-Boigny. Ces 70 hommes ont été extraits de leurs cellules dans quatre camps de détention politique: Boiro (Conakry), Kémé Bouraïma (Kindia), Soundjata Keita (Kankan) et El Hadj Oumar Tall (Labé).

Voici lune liste partielle des victimes massacrées dans la nuit du 17 au 18 octobre 1971, élaborée par l’Association des victimes du Camp Boiro. Si vous trouviez les noms qui manquent et des photos, je vous prie de nous les communiquer:

NOM FONCTIONS DATES ARRESTATION Observations sur date exécution :
ARIBOT « SODA » Souleymane – Planteur
BAH Bademba – Notable
BAH Mody Baïlo – Commerçant
BAH Thierno Ibrahima – Gouverneur /Chef de Cabinet
BALDE Abdoulaye – Directeur Ecole Militaire
BALDE Oumar – Ingénieur Secrétaire Exécutif OERS
BAMA Marcel Mato – Ministre – 3 Août 1971 à Siguiri
BANGOURA Karim – Ex Ambassadeur, Ministre des transports
Barry Abbas – Douanier
BARRY Cellou – Inspecteur des Douanes
BARRY Mody Oury – Industriel (Fils de l’Almamy de Mamou)
CAMARA Ali – InspecteurAffaires financières (douanier)
CAMARA Baba – Gouverneur
CAMARA Bakary – chef de quartier – Juillet 1971
CAMARA Bakary – Président du Tribunal
CAMARA Doussou Mory – Financier
CAMARA Fama – Douanier
CAMARA Filas – Contrôleur du travail
CONDE Emile – Gouverneur de Kankan (ancien Ministre ) – Juillet 1971
COUMBASSA Abdoulaye – Commissaire de Police (Sécurité N’Krumah)
DIALLO Abdoulaye – Docteur Chirurgien
DIALLO Alpha Amadou « M’en Parler » – Ministre de l’information – Juillet 1971
DIALLO Alpha Taran – Chirurgien, Ministre
DIALLO Karo – Infirmier Camp Boiro – Juillet ou octobre 71
DIALLO Oumar Kounda – Gouverneur
DIALLO Oury Missikoun – Inspecteur Finances
DIALLO Souleymane – Ex Minsitre Commerce Extérieur
DIALLO Souleymane Yala – Directeur des prix et conjonture – arrêté 1971
DIALLO Youssouf Lieutenant – Juillet ou octobre 71
DIOP Ahmadou Tidiane “Saint Germain” – Restaurateur
DIOP Tidiani – Directeur Administratif FRIA
FASSOU Michel – Sous-Lieutenant – Janvier ou octobre 71 ???????
GHUSSEIN Fadel – Chef de Cabinet – arrêté 1971
HABA Paul – Commissaire – 1971
HANN Saïdou ????
KABA ELHADJ Diafodé – Janvier ou octobre 71 ??????
KABA Mamady – Notable (Société Sogonikoun)
KEITA Fadiala – Ambassadeur (Directeur Général OBK) – Juil.-71
KEITA Kémoko – Magistrat (Procureur Général) – arrêté 1971
KOIVOGUI Massa – Planteur, Secrétaire Fédéral Macenta
KOUROUMA Missa – Ex Fédéral de macenta
KOUROUMA Soma – Ct Camp Samory – Juillet ou octobre 71 ???????
MAKADJI Tidiane – Agent SNE – Juillet ou octobre 71
MATHOS Gnan Felix – Directeur Banque
M’BAYE Cheick Oumar – Ambassadeur – 6 août 1971
N’DIAYE Boubacar – Lieutenant – Juillet ou octobre 71 ???????
PORRI René, dit Doumbouya – Chef Milicien Conakry 2
SAGNO Mamady – Ministre -Juillet 1971
SASSONE André – Directeur (témoin de mariage Sékou Touré) – arrêté 1971
SAVANE Morikandian – Ministre
SOW Aliou – Contributions Diverses
SOW Mamadou – Vétérinaire, Ministre du Plan.
SYLLA Fodé Saliou – Magistrat Procureur adjoint, – arrêté 1971
SYLLA Mamadouba – Chef réseau SNE – Juillet ou octobre 71
THIAM Baba Hady – Directeur de Banque – Juillet ou octobre 71
TOUNKARA Tibou – Ministre – Juillet 971
TOURE Kerfala – Urbanisme et Habitat
TOURE Sékou Sadibou – Industriel Malien Directeur Fruitaguinée

PLUS JAMAIS ÇA

Revu le 19 octobre 2018
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konakryexpress

Je revendique le titre de premier clandestin à entrer en Italie, le jour où la mort de Che Guevara a été annoncée. Mais comme ce serait long de tout décrire, je vous invite à lire cette interview accordée à un blogger et militant pour les droits humains qui retrace mon parcours dans la vie: https://fr.globalvoices.org/2013/05/20/146487/

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2 commentaires

  1. A lire ces extraits, je me pose souvent des questions dont voici quelques unes:
    – Que s’est il passé pour que tous ceux-ci soient arrêté sans aucune difficulté?
    – Où sont passés les tomes de la Révolution qui donnaient les détailles de tous ces détenus?
    – Avons nous fait exprès de les faire disparaitre pour transformer l’histoire?
    – Pourquoi les accusés survivants du 22 novembre 1970 (Siradio en l’occurrence) ont délibérément refusé une confrontation publique jusqu’à leur disparition
    La réponse à ces questions peut éclairer la lanterne de la génération future

    1. M. Kolié, les discours véritablement révolutionnaires de Sékou Touré mélangé à des mensonges ont poussé tous les guinéens à croire que le PDG ne se trompait jamais, comme cela s’est vérifié dans d’autres pays dirigés par des régimes communistes. En outre, il y a la peur et la jalousie qui paralysaient la population guinéenne dans son ensemble. Les guinéens n’ayant pas d’autres sources d’information, la radio et le journal Horoya ont joué un role important aussi.

      Pour ce qui est de la position de Siradio Diallo, je ne la comprends pas non plus. Il a joué un role ambigu soit pendant la période noire qu’après. Pendant la période noire, il aurait réussi à obtenir un financement étranger pour la formation de forces armées dans un autre pays, d’Afrique de l’ouest, en vue de renverser le régime. Des jeunes ont été recrutés et entrainés, mais les fonds ont disparu sans que ces jeunes soient payés.

      Après cette période, il a évité de revendiquer cette action, que de nombreux guinéens n’auraient pas comprise.

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