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Au maximum, un tiers des enfants finissent le primaire avec des connaissances suffisantes en lecture et en mathématiques, en Afrique francophone

Si des progrès remarquables ont été accomplis sur le plan de la scolarisation, l’accès de tous les élèves à une éducation de qualité constitue encore un défi de grande ampleur pour les pays d’Afrique de l’Ouest. Photo : Ami Vitale / Banque mondiale

D’après l’Institut statistique de l’UNESCO (ISU), plus d’un cinquième des enfants africains âgés de 6 à 11 ans ne vont pas à l’école, suivis d’un tiers des jeunes âgés de 12 à 14 ans. Près de 60 % des jeunes de 15 à 17 ans ne sont pas scolarisés. Au niveau mondial sur les plus de 15 millions des fillettes en âge qui n’auront jamais la possibilité d’apprendre à lire ou à écrire à l’école primaire, vivent en Afrique. Pourtant depuis l’indépendance les pays africains consacre d’importantes ressources à l’éducation,  ce qui a conduit à des taux de scolarisation de plus en plus élevés dans le primaire en Afrique subsaharienne. Aujourd’hui, le taux brut de scolarisation atteint les 100 % dans la majorité des pays d’Afrique subsaharienne. En moyenne général 80 % des enfants en âge scolaire sont inscrits dans une école primaire, contre 64 % en 2000. Et près de quarante pour cent d’enfants vont au collège, contre moins de trente,  il y a quinze ans.

Le problème principal, c’est la qualité de cette scolarisation.  On n’a pas besoin d’être un genie pour aboutir à la conclusion du Programme d’analyse des systèmes éducatifs (PASEC) de la Banque mondiale que l’accès à une éducation de qualité est l’un des instruments les plus efficaces pour réduire la pauvreté et les inégalités. Malheureusement, en Afrique subsaharienne, comme dans de nombreuses régions du monde, on n’en est loin.

Au moment, où se termine la Conférence qui s’est tenue  le  2 février à Dakar sur la  reconstitution du fonds du Partenariat mondial pour l’éducation (PME). J’ai pensé qu’il est utile de partager avec vous cet article de RAJA BENTAOUET KATTAN qui a procédé à une analyse d’une étude du PASEC évaluant les acquis scolaires des élèves en mathématiques et en français, et fournir ainsi des données comparatives internationales qui puissent servir de base au dialogue sur l’action à mener et à la coopération internationale. Cette étude menée en 2014, sur dix pays d’Afrique subsaharienne francophone : le Bénin, le Burkina Faso, le Burundi, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Niger, la République du Congo, le Sénégal, le Tchad et le Togo-

Malheureusement, la Guinée n’a pas fait partie de l’étude, qui a un niveau comparable de scolarisation, soit 83,5 pour cent, mais où le revenu. En mars 2017, le Secrétariat du Partenariat mondial pour l’éducation a approuvé un financement de 219 401 dollars en faveur de la Guinée pour la réalisation d’une analyse sectorielle de l’éducation. Les résultats ne sont pas encore disponibles en ligne.

 

Les résultats du PASEC offrent un état des lieux sans précédent du niveau des élèves du primaire dans ces dix pays. Ce programme constitue un élément essentiel des efforts entrepris en Afrique francophone pour promouvoir une gouvernance axée sur les résultats dans le secteur de l’éducation et pour placer les acquis scolaires au centre du débat sur les politiques éducatives. En combinant les résultats du PASEC aux données les plus récentes sur la scolarisation fournies par les enquêtes auprès des ménages, on obtient une indication précise et précieuse du nombre d’enfants qui sortent de l’école primaire avec les compétences attendues.
 
Le constat qui en découle est alarmant. Si des progrès remarquables ont été accomplis sur le plan de la scolarisation, l’accès de tous les élèves à une éducation de qualité constitue encore un défi de grande ampleur pour les pays de la région. Moins d’un tiers des élèves (voire beaucoup moins dans certains pays) terminent le cycle primaire avec un niveau suffisant en mathématiques et en français. Et le bilan est encore plus mauvais pour les enfants les plus pauvres.

Cela signifie que le reste des élèves sont incapables, au terme de leur sixième année de scolarité, d’effectuer des opérations avec décimales ou d’identifier une formule mathématique simple permettant de résoudre un problème. Ils ne sont pas non plus en mesure de comprendre une information claire donnée oralement ou le sens d’une série de mots écrits.

Les résultats de l’évaluation PASEC mettent notamment en évidence le gouffre persistant entre les enfants les plus pauvres et les enfants les plus riches. Photo : Raja Bentaouet Kattan / Banque mondiale

Dans les dix pays concernés, 71 % des élèves en deuxième année n’ont pas une maîtrise de la langue suffisante. Et, en cinquième année, ils sont 59 % à ne pas posséder les compétences mathématiques requises.

Les résultats de l’évaluation PASEC mettent également en évidence le gouffre persistant entre les enfants les plus pauvres et les enfants les plus aisés. Ainsi au Bénin, au Cameroun et au Togo, les différences de niveau en langue entre les élèves en dernière année du primaire dont les parents savent lire et écrire et ceux dont les parents sont analphabètes atteignent presque un écart-type.

Les points clés à retenir du PASEC 2014

Dans les pays d’Afrique francophone, moins d’un tiers des enfants sortent de l’école primaire avec des compétences suffisantes. Des résultats lourds de conséquences quand on sait que l’éducation est une voie de sortie de la pauvreté essentielle, mais qu’elle ne peut réaliser cette promesse que si la qualité des enseignements et des apprentissages, en plus de la scolarisation, est assurée. La majorité des jeunes d’Afrique francophone n’acquièrent pas les compétences nécessaires à leur réussite.

Au maximum, un tiers des enfants finissent le primaire avec des connaissances suffisantes en lecture et en mathématiques Fig.1: Pourcentage d’enfants qui finissent le primaire et de ceux qui le fissent avec des connaissances suffisantes

Les 40 % d’enfants les plus pauvres sont sous-représentés parmi les élèves qui obtiennent des résultats satisfaisants aux tests du PASEC. Il ne suffit donc pas de scolariser les enfants les plus pauvres : il faut aussi s’assurer qu’ils en tirent profit. Cette sous-représentation peut s’expliquer par des facteurs divers (choix politiques, moyens pédagogiques, situation individuelle des élèves, etc.) et mérite que l’on s’y penche davantage pour orienter la prise de décisions.

L’accès à l’éducation pour les plus pauvres reste limité Fig.2: Distribution sociale des élèves qui finissent le primaire avec des connaissances suffisantes en lecture et en mathématiques

 

Les fillettes issues du segment des 40 pourcent les plus pauvres de la population Fig. 3: Pourcentage des fillettes issues des 40 pour-cent les plus pauvres de la population qui finissent le primaire et celles qui le font avec des connaissances suffisantes en lecture et mathématiques

 

Les pays d’Afrique francophone ont encore beaucoup de chemin à parcourir en ce qui concerne l’éducation des filles les plus pauvres. Au Burundi, qui est le pays à se classer au premier rang de l’évaluation PASEC, 8 % des filles issues des 40 % de ménages les plus pauvres sortent de l’école primaire avec le niveau requis dans les deux disciplines. La moyenne pour les dix pays est de 3 % seulement. Autrement dit, les filles les plus pauvres figurent parmi les élèves les plus marginalisés et les moins susceptibles de bénéficier d’une éducation de qualité. Les normes culturelles, la déficience des services et des infrastructures ou encore les problèmes de sécurité sont autant de barrières qui les pénalisent de manière disproportionnée.

Pour pouvoir réduire la pauvreté, il est indispensable d’améliorer l’éducation des plus pauvres, en s’attachant davantage à inculquer aux enfants les compétences dont ils ont besoin pour réussir. Les avantages économiques de l’éducation, en particulier pour les plus pauvres, ont été démontrés. Mais, en privant les plus pauvres de cette éducation — soit parce qu’ils n’ont pas accès à l’école soit parce qu’ils n’y apprennent pas les compétences de base — on entretient le cycle de la pauvreté de génération en génération.

Les enquêtes auprès des ménages et les données nationales sur l’éducation témoignent des progrès significatifs accomplis par les pays d’Afrique francophone sur le plan de l’élargissement de l’accès à l’éducation. Grâce à la norme internationale définie par le PASEC pour les acquis scolaires, il est possible désormais de suivre leurs avancées sur ce qui est, en définitive, le plus important : les apprentissages des élèves.

Comment améliorer les acquis scolaires ? Et comment les responsables publics des pays concernés parviendront-ils à transformer leur engagement en action ? C’est à ces deux questions qu’il faut à présent répondre, et les résultats fournis par le PASEC et les autres évaluations disponibles seront essentiels pour pouvoir entreprendre des politiques et des investissements qui s’appuient sur des données probantes.

L’enjeu est de taille : sachant que de nombreux enfants d’Afrique francophone quittent l’école pendant le cycle primaire ou juste après pour rejoindre le monde du travail, il est absolument crucial d’assurer un enseignement primaire de qualité pour soutenir la productivité et, au final, faire reculer la pauvreté.

Vous pouvez consulter ici une synthèse des résultats du PASEC ainsi que des fiches-pays détaillées.

Pour en savoir plus sur les activités du Groupe de la Banque mondiale dans le secteur de l’éducation, rendez-vous sur Twitter et Flipboard.

Cet article de RAJA BENTAOUET KATTAN a été publié sur blogs.worldbank.org sous le titre de Une éducation de qualité pour tous : mieux évaluer les progrès en Afrique francophone  le 7 février 2017.

Raja Bentaouet Kattan's picture
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konakryexpress

Je revendique le titre de premier clandestin à entrer en Italie, le jour où la mort de Che Guevara a été annoncée. Mais comme ce serait long de tout décrire, je vous invite à lire cette interview accordée à un blogger et militant pour les droits humains qui retrace mon parcours dans la vie: https://fr.globalvoices.org/2013/05/20/146487/

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