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Guinée: Silence complice, complet et coupable de la société civile. !

L’heureux dénouement aux deux tentatives de « tordre le coup » à la Constitution burkinabé a été salué dans toute l’Afrique et provoqué de l’amertume chez de nombreux citoyens des autres pays, surtout voisins.

Avant le premier tour des élections présidentielles en Guinée, Bah Mamadou Lamine, grand reporter de l’hebdomadaire de Conakry Le Lynx, m’avait envoyé cet article que je vous invite à partager avec moi.

Les syndicalistes Hadja Rabiatou Diallo et feu Dr. Ibrahima Fofana. Source: webguinee.net
Les moments forts de la société civile guinéenne: les syndicalistes Hadja Rabiatou Diallo et feu Dr. Ibrahima Fofana. Source: webguinee.net

BURKINA, MON AMOUR: SOCIETE CIVILE, BALAI CITOYEN, Y’EN A MARRE !

On ne saura jamais quels sont les tenants et les aboutissants de la forfaiture militaire qui vient d’arriver au Burkina. Cet événement interpelle les Guinéens à plus d’un titre.

– Chez nous, en dépit du diagnostic particulièrement féroce et férocement exact du Général sénégalais Lamine Cissé sur l’Armée et les forces de sécurité de Guinée (FDS), notre vaillante Armée est républicaine avant la lettre. Elle n’a jamais, contrairement à la Grande muette ( qui devient de plus en plus bavarde et politicienne) du Burkina Faso, Pays des hommes Intègres, organisé un putsch contre un Président de la république (PRG) vivant. C’est la plus grande spécialiste africaine (une fois n’est pas coutume, notre pays n’a pas que des performances négatives comme cette incapacité à nous débarrasser d’Ebola) des coups d’état contre les cadavres ! De ce point de vue, nos politiciens peuvent dormir tranquilles.

-La Société civile burkinabé a, une fois encore, sorti le grand jeu, notamment en manifestant dans tout le pays, dans les villes comme dans les campagnes pour dire merde aux putschistes. Y compris les syndicats. Et en se fendant de déclarations largement médiatisées. De quoi nous rappeler avec nostalgie les événements de janvier et février 2007. En Guinée, depuis de l’eau a coulé sous les ponts. Rabiatou Sera, toute Hadja qu’elle est, est devenue « Collée Serrée » avec le parti au pouvoir. Elle peut toujours se consoler en se disant qu’elle n’est pas seule à exécuter des pas de danse radiotélévisés en direct avec mari ou femme d’autrui. Pour la pureté islamique, revenez demain ! De quoi faire se retourner Ibrahima Fofana dans sa tombe ! Avec cette trahison de la Sera on comprend quel fut son rôle dans cette historique mobilisation.

Dans le système démocratique tel que nous l’enseigne nos maitres blancs, la société civile est un contre-pouvoir censé défendre les droits des citoyens, souvent trop écrasés par la mal gouvernance et la corruption du pouvoir exécutif. En Guinée, cette société civile avait été écrasée dans l’œuf depuis la grève des enseignants de 1961. Aujourd’hui, elle est essentiellement animée par des agents de l’état qui ne peuvent pas être juges et partie. En outre, trop préoccupés par leur carrière administrative, ils n’ont ni la volonté ni le courage de jouer leur rôle. Ensuite, la société civile est souvent récupérée par les politiciens qui en font du bétail électoral dont les leaders sont soit récupéré par le parti au pouvoir, soit par les opposants. Pour la neutralité et la défense des pauvres, les séminaires-ateliers arrosés de per diems suffisent. Ses animateurs ne prennent jamais position par rapports aux actes anti-démocratiques posés çà et là par ceux qui sont assis et ceux qui cherchent à s’asseoir. Quelques exemples.

-Depuis quelque temps on voit le PRG voyager à l’intérieur du pays et distribuer avec une générosité débordante de l’argent. D’où viennent ses sous ? Est-ce l’argent public ? Pourquoi ne pas l’utiliser pour offrir davantage de services sociaux de base, boucher les trous et nids de poule de nos désastreuses routes et pistes ? Ou ramasser les ordures de nos villes et singulièrement Conakry, la plus abominable ville-poubelle d’Afrique, donc du monde? Donner de l’oxygène à nos services de réanimation ? Ou installer des labos pour chasser Ebola ou encore pour la recherche ADN, sachant que pour le moindre des actes médicaux, il nous faut, toute honte bue encore aller à Dakar comme il y a plus de 50 ans au temps de l’AOF [Afrique occidentale française]? Silence complice, complet et coupable de la Société Civile !

-A Kankan, le PRG déclare que sous Conté les malinké avaient leurs bouches dans le sac. Au regard de ce que l’on voit dans la distribution des postes dans l’administration publique, il est en train d’essuyer leurs larmes. En « mandécentralisant » tout. Avec des nominations ethno-régionales sans appels d’offres. L’ethnie du PRG est privilégiée partout. Avec l’argent public, les impôts de tous les guinéens pour les payer. Silence complice, complet et coupable de la société civile. !

– Le parti au pouvoir a privatisé le domaine public (Rues, ronds-points, monuments, véhicules administratifs, …), ministères, administration territoriale déconcentrée et décentralisée, médias publics y compris les radios rurales et/ou communautaires… Silence complet et complice de la société civile !

-Avec le maintien d’ordre, dans Bambéto-Cosa Conakry, des agents des FDS, au mépris des lois nationales et internationales se comportent envers les manifestants, en particulier les peulh avec une brutalité digne de Boko-Haram . Une brutalité accompagnée d’injures et de violences verbales propres à déclencher la guerre civile. La société civile internationale mène des enquêtes et dénonce. La société civile guinéenne la ferme. Et attend les séminaires !

A cette médiocrité de la société civile s’ajoute la carence de l’opposition gangrénée par une désespérante pauvreté en ressources de toute nature. Elle est très souvent animée par les mêmes reliquats humains des dictatures précédentes. Comme au RPG et ses « arqués, la plupart du temps de faux militants et vrais prédateurs venus à la 25ème heure, au secours de la victoire. Ils n’ont de repères que le PDG de Sékou Touré, le PUP de Conté. Autant dire qu’ils manquent d’exemples positifs, de « success stories » pouvant les inspirer. La jeunesse, complètement abandonnée ne sait à quels saints se vouer. Ces saints, on ne les trouve nulle part en Guinée. Surtout pas à la Ligue islamique dont les animateurs sont depuis belle lurette partis en campagne pour le Parti au pouvoir.

Notre pays doit se préparer à fêter son troisième Président à vie. Après Alpha, c’est Alpha. Un coup K.O. Ce ne sont pas des élections, c’est un pugilat.

Dans le concert des nations, pendant longtemps encore la Guinée va tenir la queue. En 2015, on n’exporte rien, on ne produit rien. En dehors des produits de l’économie primitive de chasse et de cueillette comme la bauxite, ou, pire, Ebola ! Notre territoire est envahi de biens manufacturés venus du Sénégal et de la Côte d’Ivoire.

L’attiéké, le foutou ou le riz ouolof, tout le monde connait. Quel est le plat guinéen que nous vendons à Abidjan ou Dakar ?

BAH Mamadou Lamine

 

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konakryexpress

Je revendique le titre de premier clandestin à entrer en Italie, le jour où la mort de Che Guevara a été annoncée. Mais comme ce serait long de tout décrire, je vous invite à lire cette interview accordée à un blogger et militant pour les droits humains qui retrace mon parcours dans la vie: https://fr.globalvoices.org/2013/05/20/146487/

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